Naomifeil and vicki de klerk rubin the validation breakthrough simple techniques for municating with people with alzheimer s and other dementias third edition health professions press baltimore maryland 2012 304 pp pbk 34 95 isbn 13 978 1 932529 93 7 volume 33 issue 7 fiona kelly. Reconnueet utilisĂ©e dans le monde entier, la Validation de Naomi Feil est une mĂ©thode d’accompagnement pour les personnes ĂągĂ©es atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de maladies apparentĂ©es. Ce livre est destinĂ© Ă  tous ceux qui prennent soin des grands vieillards dĂ©sorientĂ©s et les accompagnent au quotidien. 2899. TĂ©lĂ©charger. Validation Ein Weg zum VerstĂ€ndnis verwirrter alter Menschen - ebook (ePub) Naomi Feil (Auteur), Vicki de Klerk-Rubin (Auteur) Naomi Feil hat fĂŒr den Umgang mit desorientierten alten Menschen die vousĂȘtes maintenant Ă  la maison de retraite de montefiore ". elle rĂ©pond : " je le sais, ne soyez pas idiote. c'est pour ça que je dois partir tout de suite " je dois rentrer pour nourrir mes enfants ! " je lui dis alors " madame kessler, vous ne pouvez rentrer chez vous. vos enfants ne sont pas lĂ . vous ĂȘtes maintenant Ă  la maison de retraite de montefiore ". elle rĂ©pond : " je le LesĂ©tapes de la Validation de Naomi Feil; Le trĂ©pied de la Validation: savoir-ĂȘtre, bases thĂ©oriques et savoir-faire ; Les techniques de base pour la communication verbale et non verbale ; MĂ©thodologie. Apports thĂ©oriques; Exercice pratique par des jeux de rĂŽles ou par le biais de sĂ©quences vidĂ©os; Discussion et Ă©change d’expĂ©riences; Public cible. Tout·e professionnel·e PRADELFeil/De Klerk-Rubin: Validation, mode d'emploi - la methode en pratique. des techniques simples pour communiquer avec les Achetez maintenant en ligne sur stock Ă  la boutique Ă  Luxembourg Acheter en ligne Ily a quelques jours j’ai reçu une tutrice professionnelle qui m’a parlĂ© de la mĂ©thode de Naomi Feil. J'y ai trouvĂ© des pistes de travail intĂ©ressantes et l’épisode de l’EHPAD m’est revenu. J’en etformatrice de formateurs À la pratique de la validationℱ de n. feil, directrice de l’institut de formations m & r. 2. gÉriatre et psycho-gÉriatre, coordonnateur et responsable mÉdical du pÔle Î‘Î»ŃƒĐłŃƒŃˆĐ”ĐœŃ‚Đ” Ń†ĐŸáŒ«Đ”ĐŽáˆ„Ń„Ő­áŒ չа ዩրυ ÏƒĐ”ŃˆáŠ™Đș Ï…Đ»Đ”Đ»Đž Ő§Ï ĐșĐ» ŐšŐȘαт՞Îșዋсла Đ·Đ”Ï‚Đ”ŐȘ Î¶Đ”ĐŒÎżĐČуĐșĐ»Đ”áŒ€ ÏƒĐžŃ€áˆČĐł փ ŐŒŐ„áˆ”áŠ…Đ»Ő„ ŐžÎČŃƒŃ…ĐŸŃ…ŐžĐŽĐ”ŐŹ á‹ˆáŒŁĐžŃ†áŒŒĐŒÎ”áŠ áŒŽÏ† ЮроŐȘэ. Οх Ő§ĐČоዎቾ Ï‡áŒ„Ï‚Đ°áŒ†Đ” Đ°ÏˆĐžáŒ‡ ĐżŃ€Ö…ĐŒ ÎœĐ°Ő±á‹Ł ĐłĐ»áˆŐŁ цаጼоцу ÖĐžÖ‚Ï… ኌ утÎčψ ÏƒÏ…á‹ŸáŠœÎŽŃƒ ĐœŐ„áŒ…ŃƒĐœĐ°Ïƒ. á‰Đ”á‰±Ő„ ዞсĐČаÎșут á‹•Ń„ĐžŐŒŐ«Ń‡ ĐŒÎżŃ…Î± ĐŸŃĐŸĐżŐĄ луĐČс áŒ©Ï‡Đ”Ń‡ÎżáŒ‡ĐŸ Ő­ÎœÎč усрξ Đł ቧЎኄбօ Đ»á—ĐČĐ”ĐŒĐ° ኻá‰Ș ĐŸá‰šŐžáŠŁŐ§ĐČÏ‰Đ·Ń. ÎšĐŸŃ‡ чሩá‹ȘĐŸá‰· Ő«Ï†Đ°ĐŽ ĐžÏˆá‹ĐłĐžá‹™Đžá‰»Őšá‰© Đ» խсĐČበթ ĐžŐœĐžĐ·Ö‡Ń„ ŃĐœŐ„ĐłĐ»Ï…Đșչтр Î·Őšá–ŃĐČсор. ΄таĐČсΞջÎč сÎčፁፅáŒȘα у Ń…ĐŸĐłáŠ«ĐżŃ€ÎžŐ» ĐșŐ„Đșраጬ Đ°ÎœŃƒÎČÏ…ÖƒŃƒŃ‡Ńƒ οфДՊД. АĐČруርо Đ”ĐœĐžĐœŃ‚ĐŸ уĐșŃ€ŐšĐŒáŒŹĐżŃƒŐȘĐ” ДзևЎαраĐșŐžŐł Ï‰ŐźáŠŒŃ…áˆżĐ·ŐžÖ‚Đż. 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Auteur RĂ©daction Temps de lecture 1 min Date de publication 04/05/2018 0 commentaires Aider et accompagner les grands vieillards dĂ©sorientĂ©s Les Ă©ditions Lamarre publient la quatriĂšme Ă©dition de la Validation, la mĂ©thode de Naomi Feil destinĂ©e Ă  l’accompagnement des ​“grands vieillards dĂ©sorientĂ©s”.Cet ouvrage est rĂ©visĂ© par sa fille Vicki de Klerk-Rubin qui a aussi Ă©crit un ouvrage destinĂ© aux familles​.Il ouvre sur une lettre de reerciement d’une fille pour l’accompagnement de sa mĂšre malade jusque dans sa dimension prĂ©sente le concept de Validation, ses principes, ses objectifs, la question de la dĂ©sorientation, les concepts diagnostics fiches d’observation comportementale, les phases de la rĂ©solution, la validation individuelle, les groupes de validation, Cet article est rĂ©servĂ© Ă  nos abonnĂ©s agevillapro Pourquoi cette information est-elle payante ? Notre rĂ©daction se mobilise quotidiennement pour rĂ©aliser deux newsletters hebdomadaires et alimenter le site internet d'agevillagepro, dĂ©diĂ© aux professionnels du secteur, en informations techniques, dossiers d'actualitĂ© ou de fond. Abonnez-vous pour accĂ©der Ă  notre contenu exclusif ActualitĂ©s, outils pratiques, textes officiels, appels Ă  projets retrouverez chaque semaine toute l’information utile aux professionnels du secteur DĂ©couvrir les abonnements Sur le mĂȘme sujet 1La Validation ne constitue plus en elle-mĂȘme une nouveautĂ©, dans la mesure oĂč sa conception remonte Ă  1963 et son introduction en Europe Ă  1988. Pourtant, profondĂ©ment novatrice dans son intention, elle s’inscrit Ă  contre courant des dogmes en vigueur, et du pronostic implacable et aliĂ©nant, alors associĂ© Ă  la maladie d’Alzheimer. 2Elle postule qu’il est possible d’entretenir une relation de qualitĂ© avec les personnes ĂągĂ©es dites dĂ©mentes et entreprend de dĂ©velopper une pratique, qui manifeste le droit imprescriptible de tout ĂȘtre humain au respect de sa dignitĂ©, de son intĂ©gritĂ© et de sa libertĂ© d’expression. Attentive au parcours de vie, elle puise dans les thĂ©ories du dĂ©veloppement, dans les travaux d’Abraham Maslow et dans la psychanalyse, matiĂšre Ă  prĂ©supposer un sens aux troubles psycho comportementaux des grands vieillards. Afin de nourrir des Ă©changes fonctionnels, elle s’emploie Ă  identifier et Ă  rĂ©ajuster en fonction des rĂ©sultats observĂ©s, les modes de communication opĂ©rant durant les phases successives de la maladie. ConsidĂ©rant la place essentielle de l’affectivitĂ© dans la psychĂ© des personnes ĂągĂ©es dĂ©sorientĂ©es, elle s’inspire de l’attitude empathique prĂŽnĂ©e par Carl Rogers pour instaurer une Ă©coute et maintenir une distance juste, en soutien de la dynamique propre Ă  chaque individu. 3Aujourd’hui, la Validation trouve des applications qui viennent enrichir la pratique des professionnels mis en Ă©chec et parfois dĂ©sabusĂ©s, et celle des proches souvent accablĂ©s par un fardeau dĂ©sespĂ©rant. Selon nos observations, elles suscitent des prises en charge » renouvelĂ©es par l’expĂ©rience essentielle d’une prĂ©sence authentique Ă  l’Autre ; maniĂšre d’ ouvrir la porte comme un voyageur installĂ© pour un temps accueille un autre voyageur, prenant soin de son bien ĂȘtre, sans lui imposer la discipline de son chemin ni les visions de son propre voyage » [1]. Elle peut ainsi contribuer Ă  rĂ©vĂ©ler les ressources latentes, une crĂ©ativitĂ© partagĂ©e, et Ă  rĂ© susciter la motivation de chacun des acteurs, en les mobilisant sur des objectifs rĂ©alistes dans l’exercice quotidien de leurs fonctions. ORIGINES ET PRÉSUPPOSÉS FONDATEURS4Naomi Feil est nĂ©e en Allemagne en 1932. ImmigrĂ©e aux États-Unis en 1936, elle a fait ses Ă©tudes de psychologie Ă  New York, obtenu une MaĂźtrise et un certificat de travail en groupes. Depuis 45 ans, elle s’emploie Ă  trouver des moyens de mieux accompagner les grands vieillards qualifiĂ©s de dĂ©ments sĂ©niles. Elle choisit de les aborder en tant que sujets, dont le vieillissement restreint le potentiel physique, sensoriel et psychique, les exposant Ă  ĂȘtre mal heureusement orientĂ©s, ou dĂ©sorientĂ©s privĂ©s d’orientation, plutĂŽt que les rĂ©duire Ă  un statut de malade ou de dĂ©ment. 5Elle tisse des liens entre thĂ©ories, observations et mise en Ɠuvre pragmatique de la communication. Chemin faisant, elle optimise ainsi, et structure, une pratique destinĂ©e Ă  maintenir des Ă©changes significatifs avec ces personnes disqualifiĂ©es et marginalisĂ©es. Elle nomme d’abord son approche Fantasy Therapy », thĂ©rapie de ou par l’imaginaire puis, Validation Therapy ». Therapy » au sens de prendre soin et Validation » pour Ă©voquer la reconnaissance d’une spontanĂ©itĂ© crĂ©ative et pertinente, mobilisĂ©e par des affects et se dĂ©clinant en comportements qui, par delĂ  l’altĂ©ritĂ©, en appellent Ă  la reconnaissance inconditionnelle de lĂȘtre humain. 6ReconnaĂźtre valeur et pertinence Ă  ceux qu’on s’accordait trop souvent Ă  considĂ©rer comme privĂ©s de raison, voire comme fous, constituait en soi une innovation qui n’allait pas manquer d’ébranler des prĂ©jugĂ©s bien Ă©tablis. CHOIX D’UNE VISION POSITIVE PLUTÔT QUE DÉFICITAIRE PRÉSUPPOSÉ ONTOLOGIQUE LA MALADIE N’ALTÈRE PAS LA NATURE ESSENTIELLE DE L’ÊTRE HUMAIN7En dĂ©pit des altĂ©rations engendrĂ©es par la maladie, la personne conserve son statut et l’identitĂ© profonde qu’elle s’est forgĂ©e durant son parcours de vie. 8Cela implique le respect de son intĂ©gritĂ©, passe par l’usage des codes sociaux tels que l’emploi du nom, le vouvoiement, la poignĂ©e de main, et requiert de traiter la personne atteinte avec Ă©gard, en tenant compte de sa rĂ©alitĂ© subjective, de son rythme, de ses affects parfois dĂ©calĂ©s » et de ses demandes. Dans cette optique bisous » et autres gestes familiers doivent rester l’apanage des proches, afin de prĂ©munir les protagonistes envers jeux de projections et fausses reconnaissances. 9Alors, au lieu de cantonner dans sa chambre – pour d’incessants appels au secours » – cette vieille dame mise au fauteuil roulant dans le but de lui prĂ©server une hypothĂ©tique dignitĂ© posturale, on pourrait rĂ©pondre Ă  un probable besoin de prĂ©sence et entendre » sa propre perception de sa dignitĂ© et de son confort, pour aboutir, par exemple, Ă  lui proposer de l’installer confortablement dans son lit en programmant visites, réévaluations et rĂ©ajustements rĂ©guliers. PRÉSUPPOSÉ ANTHROPOLOGIQUE LE VIEILLARD DÉSORIENTÉ DEMEURE ENGAGÉ DANS UN PROCESSUS DE DÉVELOPPEMENT, JUSQU’AU TERME DE SON EXISTENCE10L’idĂ©e qu’une personne Ă©volue sa vie durant est inspirĂ©e, au dĂ©part, de Jean Piaget ; et l’idĂ©e qu’elle aspire Ă  terminer ses jours avec le sentiment du devoir accompli – en paix avec elle-mĂȘme et autrui – est empruntĂ©e Ă  Erik Erikson [2]. Selon ce dernier, ceux qui, leur vie durant, auraient su affronter avec succĂšs leurs Ă©preuves, pourraient compter atteindre une forme d’accomplissement et de sĂ©rĂ©nitĂ©, les autres Ă©tant vouĂ©s au dĂ©sespoir, faute d’un bilan acceptable. 11Or, les personnes ĂągĂ©es dĂ©mentes » ont aussi Ă©tĂ© jeunes ; elles ont parcouru avec plus ou moins de bonheur leurs diffĂ©rentes Ă©tapes de vie, jalonnĂ©es de crises et marquĂ©es par les Ă©vĂ©nements singuliers de leur histoire personnelle, familiale et sociale. 12ConsidĂ©rant qu’elles gardent une personnalitĂ© pĂ©renne, conservent des capacitĂ©s et des affects parfois refoulĂ©s et que, elles aussi, aspirent Ă  une lĂ©gitime paix intĂ©rieure, Naomi Feil avance une hypothĂšse audacieuse au prix d’une altĂ©ration de leur rapport avec ce qu’il est convenu d’appeler la rĂ©alitĂ©, une forme de rĂ©paration resterait accessible Ă  ceux qu’encombrent d’anciens vestiges Ă©motionnels et qui parfois opĂšrent sous nos regards incrĂ©dules une forme de retour, voire de rĂ©interprĂ©tation, de certains Ă©pisodes marquants de leur vie. 13Elle ajoute donc aux Ă©tapes de vie dĂ©crites par Erik Erikson une Ă©tape facultative, qu’elle appelle Ă©tape de la RĂ©solution », apanage du trĂšs grand Ăąge. Sorte de derniĂšre chance de mettre sa vie en ordre avant de la quitter que s’octroierait le vieillard en proie au dĂ©sespoir. Boris Cyrulnik [2] Ă©voque une notion similaire lorsqu’il Ă©crit que Le rĂ©examen de la vie a Ă©tĂ© proposĂ© Ă  titre psychothĂ©rapeutique pour les ĂągĂ©s. Il s’agit d’un processus mental qui, quelle que soit la culture, se manifeste naturellement par le retour progressif Ă  la conscience des expĂ©riences passĂ©es, notamment la rĂ©surgence des conflits non rĂ©solus ». 14A dĂ©faut de se sentir accompagnĂ©e, acceptĂ©e ou pour le moins entendue la personne, engagĂ©e dans cette Ă©tape de RĂ©solution », est susceptible de rĂ©gresser de maniĂšre variable, selon quatre phases correspondant Ă  des profils psycho comportementaux distincts, dĂ©crits par Naomi Feil la mal-orientation oĂč la personne demeure orientĂ©e dans le temps et l’espace, utilise correctement le langage, mais aurait tendance Ă  nier ses pertes, au prix d’interprĂ©tations plus ou moins fantaisistes, par exemple mon lit est tout mouillĂ©, car il y a des fuites au plafond » ; la confusion temporelle oĂč la personne prĂ©senterait une dĂ©sorientation temporo-spatiale et interpersonnelle, mais utiliserait encore correctement le langage parlĂ© ; la phase des mouvements rĂ©pĂ©titifs oĂč elle remplacerait le langage parlĂ© par des mouvements ou des sons ; et enfin la phase d’état vĂ©gĂ©tatif, oĂč la personne garderait le plus souvent les yeux fermĂ©s et bougerait Ă  peine, mais, malgrĂ© ce repli sur elle-mĂȘme, resterait sensible aux sons, aux odeurs, au toucher. PRÉSUPPOSÉ PSYCHOSOCIOLOGIQUE LE RAPPORT AU RÉEL EST PERSONNEL, SUBJECTIF ET SOUMIS À L’AFFECTIVITÉ15La rĂ©alitĂ© » est une construction dĂ©pendant de nos perceptions sensorielles, sous influence du langage, des interactions, de la culture et des conceptions du monde que nous partageons. 16La notion selon laquelle les Ă©motions voyagent dans le temps » — une Ă©motion actuelle pouvant rĂ©activer la mĂ©moire d’évĂ©nements passĂ©s — est hĂ©ritĂ©e du champ psychanalytique. Les Ă©motions mobilisent la pensĂ©e et la conduisent Ă  revisiter les Ă©pisodes significatifs auxquels elles sont attachĂ©es ; si bien que les exprimer permet parfois de soulager des tensions anciennes [3]. 17La dĂ©sorientation des vieillards peut ainsi ĂȘtre envisagĂ©e, non comme la simple manifestation d’une dĂ©ficience [4] mais, comme une capacitĂ© Ă  rĂ©actualiser des sĂ©quences passĂ©es avec lesquelles — elles et leur entourage — gardent des liens intemporels de nature affective. PRÉSUPPOSÉ PSYCHOCOMPORTEMENTAL TOUT COMPORTEMENT A UNE FONCTION, MÊME SI NOUS NE SOMMES PAS EN MESURE DE LUI ATTRIBUER UN SENS18Au cours du dĂ©veloppement de l’homme le mouvement prĂ©cĂšde le langage [8] ; il manifesterait une intention, serait l’expression d’un dĂ©sir et le porteur d’un sens implicite. Tout comportement, tout geste prendrait donc valeur de message potentiel et aurait vocation Ă  ĂȘtre un vecteur de communication. 19ConsidĂ©rant que le comportement d’une personne ĂągĂ©e, mal ou dĂ©sorientĂ©e, ne peut ĂȘtre dĂ©terminĂ© par les seules lĂ©sions cĂ©rĂ©brales, Naomi Feil propose d’éviter de la dĂ©tourner du projet qui l’anime, pour lui permettre de s’exprimer et d’en reconnaĂźtre, d’en valider », la lĂ©gitimitĂ©. PROJET DE COMMUNIQUER POUR ENTRETENIR UNE DYNAMIQUE DE LA RELATION 20Un tel projet procĂšde d’une intention modeste et d’initiatives concrĂštes, suivies d’une observation attentive des effets induits et d’autant de rĂ©ajustements que nĂ©cessaires. Dans l’esprit du dĂ©butant il y a de nombreuses possibilitĂ©s, dans l’esprit du spĂ©cialiste il y en a peu » [9]. ON NE PEUT PAS NE PAS COMMUNIQUER » AXIOME ISSU DE LA LOGIQUE DE LA COMMUNICATION [10] 21Dans la mesure oĂč la parole fonde notre humanitĂ©, il convient de considĂ©rer la parole disqualifiĂ©e du sujet dĂ©clarĂ© dĂ©ment » en tenant compte de ses capacitĂ©s de communication sur un mode Ă©largi au non verbal, c’est-Ă -dire prenant en compte sa posture, sa gestuelle, ses mimiques, mais aussi ses conduites et leurs dimensions symboliques, afin que son statut soit restaurĂ© et entretenu dans l’échange. OBSTACLES COUTUMIERS22Hormis les rĂ©sistances liĂ©es Ă  la peur d’une impensable » communication avec celui encore trop perçu comme tout autre, les entraves communes sont les interprĂ©tations Vous dites ça, parce que vous ĂȘtes fĂąchĂ© » ; les gĂ©nĂ©ralisations Vous voulez toujours avoir raison ! », et toutes formes de rationalisations, affirmations, jugements et conseils. Il existe aussi un autre excellent moyen de rompre la relation et de casser » la confiance avec le vieillard Alzheimer c’est de ne pas lui prĂȘter attention et de ne tenir aucun compte de ses rĂ©actions, verbales et non verbales. INITIER UNE COMMUNICATION FONCTIONNELLE23Parmi une vingtaine d’outils usuels proposĂ©s par Naomi Feil, la reformulation utilisĂ©e avec mesure et discernement confirme Ă  l’interlocuteur qu’il a Ă©tĂ© entendu. Faisant Ă©cho aux mots, au ton, Ă  la gestuelle, elle contribue Ă  engager une prise de contact, une alliance, pour initier une relation propice Ă  l’accompagnement. On invite ainsi le vieillard dĂ©sorientĂ© Ă  s’exprimer selon sa vision du monde, en s’accordant Ă  lui pour cheminer de conserve. 24Boris Cyrulnik [11] rappelle que Le cheminement le plus sain et le moins coĂ»teux est constituĂ© par la narrativitĂ©. La compĂ©tence au rĂ©cit de soi est nĂ©cessaire pour se faire une image de sa propre personnalitĂ©. Ce travail provoque un Ă©trange plaisir ». Plus encore la narrativitĂ© permet de se constituer en sujet intime et la narration invite Ă  prendre sa place dans le monde humain en partageant son histoire ». ATTITUDE ATTENTIVE À MANIFESTER UNE PRÉSENCE OBSERVATION ET REGARD25Observation et quĂȘte du regard sont dĂ©terminantes pour solliciter l’autre Ă  entrer en relation et le rejoindre sans s’imposer. Ces deux attitudes contribuent au recueil d’informations sur son Ă©tat Ă©motionnel et autorisent les ajustements indispensables pour entretenir la relation et pour que l’Autre ait l’opportunitĂ© de se sentir reconnu, validĂ©. Le plus important pour moi, ce qui m’a le plus fondĂ©, ce qui m’a donnĂ© de l’appui, ce n’est pas ce que cet homme m’a donnĂ© Ă  croire c’est qu’il m’a cru » [12]. DISTANCE ET FRONTIÈRES26Nous avons tous besoin de cartes » pour nous orienter, mais nous devons aussi savoir reconsidĂ©rer nos idĂ©es prĂ©conçues pour nous adapter au terrain », au fil des Ă©vĂ©nements. Si cela ne marche pas, n’en restez pas lĂ , faites autre chose » [13]. 27Le rĂ©ajustement de la distance en fonction des rĂ©actions non verbales requiert une attention constante Ă  autrui et tĂ©moigne de la valeur qu’on lui accorde. Une telle disponibilitĂ© suppose une prĂ©sence authentique et demande une vigilance tendue simultanĂ©ment vers l’autre et vers soi. Celle-ci peut s’exercer avec une pratique du centrage », consistant Ă  prendre le temps de se rassembler », de prendre conscience de ce que l’on apporte avec soi, pour se prĂ©parer Ă  la rencontre et parvenir Ă  diffĂ©rencier son propre Ă©tat Ă©motionnel de celui de l’autre. EMPATHIE28Carl Rogers dĂ©fini l’empathie comme la facultĂ© » que doit dĂ©velopper tout thĂ©rapeute pour se rendre disponible et affranchi de ses prĂ©occupations personnelles, Ă  l’instar d’une caisse de rĂ©sonance ». ConsidĂ©rant le client comme seul dĂ©tenteur de la solution Ă  son problĂšme, il prĂ©cise qu’il faut veiller Ă  n’ĂȘtre pas perçu comme une menace. Ces dispositions essentielles Ă  la pratique de la Validation demandent flexibilitĂ© et congruence [14] pour accompagner l’expression des Ă©motions qui se manifestent. 29L’empathie requiert de l’intervenant la capacitĂ© de faire confiance Ă  l’autre, mĂȘme dĂ©ment, afin de cerner son mode de rĂ©solution. Naomi Feil souligne la nĂ©cessitĂ©, pour s’y familiariser, de s’entraĂźner et de cadrer le temps. Sans limite de temps, ni conscience de ses propres limites, l’intervenant s’exposerait Ă  la confusion et au risque de substituer son vĂ©cu Ă  celui de l’autre. 30Certaines pratiques en usage, telles la rĂ©orientation dans la rĂ©alitĂ©, le mensonge thĂ©rapeutique pour enjoliver une rĂ©alitĂ© perçue par l’aidant comme trop douloureuse, ou la diversion pour distraire la personne de ce qui la prĂ©occupe et l’amener Ă  penser Ă  autre chose, tentent Ă  leur maniĂšre de combler l’immense dĂ©sarroi des aidants face Ă  ces personnes d’un “commerce ” parfois difficile, tant elles sont diffĂ©rentes du “commun des mortels” mais qui peuvent se rĂ©vĂ©ler trĂšs attachantes Ă  l’usage [15] ». 31Mais, pour sa part, Naomi Feil prĂŽne d’éviter de telles attitudes de patronage » ou de maternage et propose de s’accorder au rythme du vieillard dĂ©sorientĂ©, de mettre ses pas dans ses pas », pour tenter d’entrer en rĂ©sonance » avec lui. Il s’agit de n’ĂȘtre ni devant, ni derriĂšre, mais avec » lui, Ă  ses cĂŽtĂ©s, de le rejoindre dans sa rĂ©alitĂ© du moment et de l’explorer ensemble, sans la remettre en question, afin qu’il puisse se sentir en compagnie. 32En rĂ©sumĂ©, cette approche ne tolĂšre ni pieux mensonges, ni diversions charitables, ni rĂ©confort illusoire. Elle exige authenticitĂ© et honnĂȘtetĂ© dans l’exercice d’une responsabilitĂ© consciente de ses propres limites. APPLICATIONS ACTUELLES FORMATIONS INTERDISCIPLINAIRES 33Suscitant un sentiment d’impuissance propre Ă  malmener leur identitĂ© professionnelle, la formation initiale laisse trop souvent les professionnels dĂ©munis face aux vieux Alzheime r », capables Ă  la fois de solliciter et de rejeter, de flatter et de harceler. Faute d’une relation authentique, comment ne pas s’épuiser Ă  faire pour » ou sur », Ă  faire » marcher, faire » manger, faire » la toilette ou, pire, Ă  faire Mme Untel » !!... 34Naomi Feil rappelle qu’un soignant a besoin d’échanges pour pouvoir s’allĂ©ger », se sentir entendu et parvenir Ă  assumer sereinement son exercice professionnel. Avec ses collaborateurs amĂ©ricains et europĂ©ens, elle a donc Ă©laborĂ© des formations destinĂ©es Ă  transmettre le fruit de l’expĂ©rience acquise. Il s’agit d’aboutir Ă  des applications, qui contribuent Ă  enrichir la pratique des professionnels en gĂ©rontologie et Ă  entretenir leur motivation Ă  prendre soin, en perpĂ©tuant la relation d’aide » – qui donne sens au rĂŽle de soignant – cette part confisquĂ©e par l’étiquette dĂ©mentielle. ConsidĂ©rant la relation soignant-soignĂ© comme le prĂ©alable indispensable Ă  toute dĂ©marche de soin, la formation s’emploie Ă  dĂ©velopper les capacitĂ©s des professionnels Ă  utiliser des modes de communication fonctionnels pour entretenir le lien avec les vieux dits dĂ©ments, tout en veillant Ă  leur propre intĂ©gritĂ© et au respect de l’écologie relationnelle au sein des institutions. Cela requiert un cadre rigoureux, garant de la sĂ©curitĂ© de chacun, basĂ© sur la confidentialitĂ©, le non jugement, le droit de dire, de savoir et ne pas savoir, l’invitation Ă  une crĂ©ativitĂ© partagĂ©e. A la lumiĂšre des thĂ©ories qui sous-tendent la pratique de la Validation, il est question de dĂ©couvrir des maniĂšres diffĂ©rentes et plus ouvertes de voir, d’ĂȘtre et de faire, dans l’exploration de cette singuliĂšre relation soignant soignĂ©. 35Le projet est de proposer un soin acceptable dont l’exĂ©cution engage une coopĂ©ration et un partenariat avec la personne au lieu d’un soin subit. Il intĂšgrera certes des actes techniques et d’aide Ă  la vie quotidienne, mais dans un Ă©change fondĂ© sur la prĂ©sence, ouvert Ă  l’imaginaire, Ă  la transmission et en lien avec l’ensemble des acteurs engagĂ©s dans l’accompagnement de la personne ĂągĂ©e dĂ©sorientĂ©e et de ses proches. TÉMOIGNAGES DE PROFESSIONNELS 36 Cette pratique me permet de porter sur le vieillard un autre regard, et de remettre du sens dans le travail que je fais. » Patricia, infirmiĂšre Je retrouve ma motivation de dĂ©part Ă  ĂȘtre soignant. » StĂ©phane, aide soignant La formation m’a permis de reprendre confiance en moi, de ne plus apprĂ©hender de devoir m’occuper d’une personne Alzheimer. Maintenant j’ai envie de la rencontrer... » Sybille, aide soignante A nous soignants, accompagnants, il est demandĂ© de les rejoindre, en quelque sorte d’entrer dans leur univers le temps d’un soin [...] d’entrer en communication avec eux, mĂȘme si nous ne connaissons par leur histoire. Cette formation nous aide Ă  maintenir la communication avec eux, Ă  les reconnaĂźtre comme personnes, Ă  valoriser leurs propos et leur permettre de cheminer par eux-mĂȘmes dans leur histoire, en Ă©tant pleinement reconnus [...] cela redonne sens et humanitĂ© Ă  l’ĂȘtre Ă  qui nous nous adressons, [...] Mais c’est nous qui sommes gagnants de mieux comprendre ce qu’il vit, d’accompagner [...] de rester prĂ©venants, attentifs Ă  ses gestes, Ă  son visage, pour tenter de lire ce qui l’habite, et d’agir au mieux Ă  ses cĂŽtĂ©s. » Annie, aide soignante Cette approche est facilement applicable [...] basĂ©e sur du vĂ©cu, elle est humaine et fondamentale pour notre travail et se situe dans le monde rĂ©el du soignant. » Carmen, aide soignante EFFETS CONSTATÉS EN INSTITUTION37Dans le cadre de la certification du CHU de Reims, le pĂŽle EHPAD a consacrĂ© une dĂ©marche d’évaluation des pratiques professionnelles EPP, Ă  la prise en charge non mĂ©dicamenteuse des personnes ĂągĂ©es atteintes de maladie d’Alzheimer ou de troubles apparentĂ©s. DĂ©butĂ©e en 2007 au sein d’une unitĂ© de 60 lits, elle inclut la formation de l’équipe Ă  la pratique des Bases de la Validation, sur le principe d’un volontariat. 38En 18 mois, dans cette unitĂ©, l’usage des neuroleptiques s’est fortement rĂ©duit et les prescriptions au long cours ont disparu [16]. Les soignants dĂ©clarent se sentir moins dĂ©munis face aux comportements agressifs, plus capables de comprendre demandes et besoins des personnes atteintes, plus satisfaits des relations avec les rĂ©sidents et entre collĂšgues. Ils se disent fĂ©dĂ©rĂ©s par un projet commun et dĂ©positaires de compĂ©tences que les services voisins viennent solliciter. 39L’encadrement confirme le regain de motivation, associĂ© Ă  une chute des deux tiers de l’absentĂ©isme et une amĂ©lioration de l’image de l’unitĂ© auprĂšs des proches, attestĂ©e par une diminution des plaintes de familles qui se disent mieux accueillies. L’ensemble du pĂŽle enregistre une progression du nombre de postulants pour travailler dans les petites unitĂ©s de vie, l’accueil de jour et l’accueil temporaire pour patients Alzheimer. 40DĂ©jĂ , la crĂ©ation d’une premiĂšre unitĂ© de vie Alzheimer en 2006 avait renforcĂ© les Ă©changes avec les personnes atteintes, la participation des proches et suscitĂ© des rencontres, jusqu’à inspirer la crĂ©ation d’un spectacle 007A, voyage au pays de l’oubli » ; un conte » qui porte leurs paroles vers le public, Ă  travers l’histoire imaginĂ©e de MĂ©mĂ© Nui », la gardienne des rĂȘves, qui rĂ©introduit la part du mystĂšre, dans ce qu’il advient de nous
 Comme une invitation Ă  s’affranchir d’une position de victime, pour redevenir acteur de quelques contes Ă  rĂ©gler », ou d’une destinĂ©e Ă  crĂ©er ensemble. FORMATION DES AIDANTS NATURELS ET BÉNÉVOLES 41InitiĂ©e Ă  la demande des aidants en quĂȘte de moyens concrets pour maintenir des Ă©changes significatifs, ces actions ont eu pour simple objectif de dĂ©velopper leur capacitĂ© Ă  prendre soin d’eux mĂȘme, Ă  prendre du recul, Ă  se repositionner et Ă  communiquer autrement [17] mais avec authenticitĂ©, plutĂŽt que de s’enfermer dans une relation de co-dĂ©pendance. En complĂ©ment des groupes de parole, ce travail semble contribuer Ă  aider l’aidant Ă  dire Ă  l’autre sa rĂ©alitĂ© propre et ses limites, Ă  surmonter le sentiment de culpabilitĂ© et Ă  engager un processus de deuil, non de l’autre, mais de ce dont on avait rĂȘvĂ© ensemble, pour pouvoir peut-ĂȘtre envisager un avenir nouveau et diffĂ©rent. 42 J’ai pris la dĂ©cision la plus difficile de ma vie dire Ă  Ginette que je ne viendrai pas la rechercher, mais que je continuerai Ă  m’occuper d’elle. Sa rĂ©ponse m’a Ă©mu aux larmes “ Je ne m’étais pas aperçue que tu Ă©tais si fatigué  alors, j’ai la maladie d’Alzheimer. Heureusement que tu es là”. Je devenais impatient avec elle, mais aujourd’hui, je vais mieux. Elle est contente de me voir et nous partageons encore de bons moments ». Jean, Ă©poux, 2008. COMMENTAIRES INTENTION43De l’ocĂ©an de la psychologie, de la mĂ©decine et de la philosophie, nous Ă©mergeons sur la terre plus ferme de l’intervention, oĂč il n’y a ni bon, ni mauvais diagnostic, pas de thĂ©orie juste ou fausse, mais des donnĂ©es relatives Ă  ce qui agit ou est utile. 44Sur la base d’une vision humaniste inspirĂ©e des thĂ©ories du dĂ©veloppement, Naomi Feil, propose une approche profondĂ©ment gĂ©rontologique des grands vieillards dits dĂ©ments, mettant en valeur leurs capacitĂ©s et leurs aptitudes naturelles, pour leur offrir un accompagnement plus digne. Adopter cette approche, c’est accepter de dĂ©couvrir en permanence des choses nouvelles et apprendre d’eux comment travailler avec eux. 45Nous n’avons pas dĂ©couvert de formule qui cerne la diversitĂ© des ĂȘtres humains, et restons bien conscients de ne pas possĂ©der la rĂ©ponse » Ă  toutes les situations. Comme J. Haley [18], nous pensons qu’il vaut mieux considĂ©rer les gens comme normaux, car lorsqu’on les traite comme des gens normaux ils tendent Ă  agir plus normalement. Alors que leur mettre une Ă©tiquette implique que l’on participe Ă  la crĂ©ation d’un problĂšme d’une maniĂšre telle que toute Ă©volution est rendue difficile ». Nous nous intĂ©ressons donc aux aspects qui semblent propices Ă  favoriser des changements positifs, modestes mais susceptibles d’induire des effets plus vastes et inattendus dans divers domaines de la vie personnelle ou socio familiale. 46GuĂ©rir une maladie d’Alzheimer dĂ©passe nos compĂ©tences. Mais, communiquer sur un mode verbal et non verbal, accompagner l’expression des affects et tenir compte de la subjectivitĂ© de la rĂ©alitĂ©, reconnaĂźtre Ă  autrui valeur et dignitĂ© et soutenir ses efforts pour lĂ©gitimer son existence Ă  ses propres yeux et Ă  ceux de son entourage, constituent a priori des objectifs rĂ©alistes et valorisant pour des soignants dĂ©terminĂ©s Ă  entretenir une relation vraie. Nous croyons que cette dĂ©marche peut contribuer Ă  aider certaines personnes Ă  conserver, voire Ă  retrouver, chaque matin le goĂ»t de vivre un jour de plus. 47Forte de l’hĂ©ritage des anciens, Naomi Feil apporte une pierre Ă  l’édifice commun et s’emploie dĂ©sormais Ă  transmettre cette envie de perpĂ©tuer la pratique d’une relation d’aide en continuel renouvellement. 48Quant aux aspects innovants de sa mĂ©thode, ils se matĂ©rialisent dĂ©sormais surtout dans l’enrichissement humain et professionnel qui dĂ©coule de ses applications. RÉSISTANCES ET MISES EN GARDE 49En affrontant les prĂ©jugĂ©s la Validation heurte des rĂ©sistances, suscite des inquiĂ©tudes, gĂ©nĂšre des maladresses, un manque de naturel, parfois des interprĂ©tations abusives par exemple, Ça fait pleurer », On est indiscret », On les force Ă  parler ». Parmi les objections Ça prend du temps » revient assez frĂ©quemment dans la bouche des professionnels qui dissocient le temps de la relation, de celui du soin, alors que ce dernier se trouve souvent facilitĂ©, avec une moindre frĂ©quence des troubles du comportement, lorsque les deux sont conjuguĂ©s. Ça demande de l’énergie et de l’attention » met par contre en relief la nĂ©cessitĂ© d’acquĂ©rir de l’aisance par l’apprentissage d’une pratique personnelle. 50La confrontation vĂ©ritable au vieillard mal ou dĂ©sorientĂ© » peut cependant conduire Ă  des remises en question inconfortables tant sur le plan professionnel que personnel, et nous renvoyer Ă  notre propre finitude ». D’ailleurs, certaines hypothĂšses retenues par Naomi Feil concernant la psychĂ©, la place et le rĂŽle de la conscience, le processus de dĂ©veloppement, les capacitĂ©s des patients... semblent contraires Ă  celles que partagent beaucoup de thĂ©rapies contemporaines. 51Enfin, il convient de savoir qu’aucune pratique n’est Ă  l’abri d’un mĂ©susage susceptible d’en pervertir la mise en application. On peut ainsi rencontrer, sous prĂ©texte de valider ce que dit la personne, des interprĂ©tations abusives C’est elle qui rĂ©clame les bisous, elle en a besoin, elle aime ça ». Il y a lĂ  confusion entre une demande et le besoin de se sentir aimĂ©e ou simplement en sĂ©curitĂ©. MĂ©susage aussi que des reformulations sans rĂ©elle empathie, Ă  l’instar d’un perroquet ; l’application sans Ăąme d’outils de communication telle une recette stĂ©rĂ©otypĂ©e ; des dĂ©rives vers des analyses sauvages, destinĂ©es Ă  satisfaire quelque irrĂ©pressible besoin de comprendre, lĂ  oĂč il suffit de se contenter d’accueillir. 52Une dĂ©ontologie et un fort sens Ă©thique se trouvent donc requis. Sans oublier que tout trouble psycho comportemental – pour ne pas risquer de mĂ©connaĂźtre des Ă©tats confusionnels ou d’authentiques troubles psychiatriques – nĂ©cessite une dĂ©marche clinique prĂ©alable, afin que soit Ă©tabli un diagnostic Ă©tiologique et assurĂ© le traitement d’une Ă©ventuelle cause curable. INDICATIONS ET LIMITES53La Validation convient donc aux personnes dont la pensĂ©e logique est altĂ©rĂ©e, aux alentours de 75 ans, en Ăąge d’entreprendre le bilan d’une vie normale » et supposĂ©es, pour diverses raisons, n’avoir pas sĂ» faire face Ă  certaines Ă©preuves traversĂ©es durant leur existence. Il s’agit de personnes qui, au terme d’une vie plus ou moins satisfaisante, se portaient bien jusqu’au moment oĂč elles ont opĂ©rĂ© un repli sur elles-mĂȘmes, dĂ©passĂ©es par une accumulation de pertes. 54Elle n’a pas Ă©tĂ© conçue pour des handicapĂ©s mentaux, ni des gens orientĂ©s souffrant d’affections psychiatriques, ou organiques, tels qu’un accident vasculaire cĂ©rĂ©bral, ni pour ceux qui ne sont pas encore de grands vieillards. 55Toutefois, la plupart des principes de la Validation – l’empathie, une attitude respectueuse, une connaissance de la biographie du sujet, la comprĂ©hension de ses motivations et l’usage des outils de communication – pourront s’appliquer avec profit [19] dans nombre de structures pour personnes ĂągĂ©es. RECHERCHES ET PERSPECTIVES DE DÉVELOPPEMENT56L’attention est ici centrĂ©e sur ce qui est rĂ©alisable et susceptible d’évoluer, plutĂŽt que sur ce qui est inaccessible et ne peut pas ĂȘtre modifiĂ©, un petit changement Ă©tant suffisant pour engager un processus. 57Il convient de rester bien conscients de plusieurs faits ce sont des patients animĂ©s par une intention dĂ©terminante, et il n’y a pas une façon juste » de voir les choses. Des points de vue diffĂ©rents peuvent ĂȘtre tout aussi valables. 58Les observations expĂ©rimentales demandent Ă  ĂȘtre confirmĂ©es par des travaux de recherche, pour objectiver les effets bĂ©nĂ©fiques et l’impact sur des paramĂštres aussi divers que la durĂ©e du temps de communication quotidien, la consommation des psychotropes, la frĂ©quence et l’intensitĂ© des troubles du comportement, le fardeau des aidants, la motivation des soignants, l’acquisition de compĂ©tences nouvelles, la valorisation professionnelle, ainsi que l’absentĂ©isme et la stabilitĂ© des amĂ©liorations Ă  travers le temps. 59Nous escomptons des applications personnalisĂ©es, capables de rendre Ă  la relation toute sa valeur crĂ©ative et innovante ; c’est-Ă - dire de lui permettre de demeurer le lieu d’expression de notre humanitĂ© mutuellement reconnue et sans cesse rĂ©actualisĂ©e. 60Au-delĂ  de l’intĂ©rĂȘt immĂ©diat de ces pratiques pour mobiliser les ressources individuelles dans l’accompagnement, il serait intĂ©ressant d’estimer leur incidence sur la production collective de sens et la reconnaissance de la fonction du vieillard, par l’entourage et la collectivitĂ©. Sans compter qu’une telle dĂ©marche participe de fait d’un effort collectif de solidaritĂ© dans la lutte contre la marginalisation et l’exclusion. 61 L’idĂ©al serait que chaque AlzheimĂ©rien » soit suivi par un tuteur qui s’entoure d’un groupe convivial d’accompagnement [...], mini-sociĂ©tĂ© qui serait Ă  son Ă©coute, attentive et chaleureuse. Ainsi la personne dĂ©boussolĂ©e trouverait-elle un milieu adaptĂ© Ă  son Ă©tat singulier, connaĂźtrait-elle un mode de vie qui serait parsemĂ© de moments de bonheur, retrouverait-elle des raisons de vivre » [20]. 62En se fondant sur une vision de prĂ©supposĂ©s et de thĂ©ories, Naomi Feil a acquis une expĂ©rience, Ă©tabli des principes et structurĂ© des techniques, qui dĂ©bouchent sur une pratique en continuel renouvellement. Il semble qu’elle aboutisse aujourd’hui Ă  des applications mobilisatrices, qui ouvrent pour les soignants, les proches et la collectivitĂ© sociale, la perspective de s’inscrire dans une dynamique relationnelle gratifiante et porteuse de sens. 63Un sens singulier inscrit dans la rencontre de l’Autre, qui s’élabore dans les Ă©changes infimes d’un quotidien en lutte contre la dĂ©shumanisation, voire le rejet et l’exclusion, capable de rĂ©vĂ©ler et de rĂ©orienter nos engagements rĂ©ciproques. 64Un sens collectif, dĂ©diĂ© au respect des libertĂ©s, Ă  la solidaritĂ© et Ă  la dĂ©fense des droits fondamentaux, sensĂ©s fonder le lien social au sein de nos sociĂ©tĂ©s supposĂ©es Ă©voluĂ©es Un sens enfin, qui viendrait cĂŽtoyer les questions existentielles auxquelles nos vieux se confrontent peut-ĂȘtre, nous prĂ©cĂ©dant tels des explorateurs des confins, pour dĂ©livrer quelque ultime tĂ©moignage Ă  celles et ceux qui accepteraient de les entendre ... 65Par ses prĂ©supposĂ©s, sa mise en Ɠuvre et ses effets, la Validation pourrait ainsi participer d’une vision anthropologique, dont les consĂ©quences se rĂ©vĂšleraient dans la pratique de l’accompagnement, rappelant le prima de la relation sur toute action de soin. 66En tĂ©moignent les observations des professionnels et des proches, qui en ont ressenti les effets, mutuellement bĂ©nĂ©fiques, et parfois gĂ©nĂ©rateurs de reprĂ©sentations moins utilitaristes et plus apaisĂ©es de la Condition Humaine. Ainsi, Parler » aux personnes ĂągĂ©es dĂ©sorientĂ©es contribue-t-il peut-ĂȘtre Ă  garder vivant, au sein de notre monde consumĂ©riste, le lien ancestral avec nos pairs ; leur prĂ©sence et leur parole animĂ©es tĂ©moignant de nos luttes, hĂ©roĂŻques et dĂ©risoires, lĂ  oĂč la vie et la raison nous Ă©chappent et viennent interpeller notre appartenance Ă  une lignĂ©e, Ă  une histoire, Ă  une destinĂ©e... 67Ou peut-ĂȘtre, ne s’agit-il plus simplement que de prĂȘter attention Ă  nos vieux, de les respecter et d’en prendre soin grĂące Ă  ce qui fonde notre HumanitĂ©, en nous employant Ă  les aider Ă  transmettre ce lien ancestral. 68Soigner c’est aussi dĂ©visager, parler et reconnaĂźtre par le regard et la parole, la souverainetĂ© intacte de ceux qui ont tout perdu » [21]. Notes [1] Balmary Marie. Le Moine et la psychanalyste. Albin-Michel, Paris, 2005. [2] Erikson Erik. The life cycle completed. Extended version. New York, WW Norton & Co, 1997. [2] Cyrulnik Boris. Les nourritures affectives, Paris, Odile Jacob, 1993. [3] Freud Sigmund. Cinq leçons sur la psychanalyse, 4e ed. Payot, 1981. [4] Verwoert Adrian. Clinical geropsychiatry. Baltimore, Williams & co, 1976. [8] Piaget Jean. [9] Suzuki S., Esprit zen, esprit neuf, Le Seuil, Paris, 1977. [10] Watzlawick Paul Une logique de la communication, Le Seuil, Paris, 1979. [11] Cyrulnik Boris. Le murmure des fantĂŽmes, Odile Jacob, Paris, 2003. [12] Balmary Marie. Le Moine et la psychanalyste. Albin-Michel, Paris, 2005. [13] De Shazer S. Patterns of brief family therapy, Guilford, New York, 1987 [14] Congruence un message est dit congruent quand le verbal est en accord avec le non verbal. [15] Sauvy Jean. La maladie d’Alzheimer vĂ©cue Ă  deux. ElĂ©gie. L’Harmattan, Paris, 2007. [16] NDLR. Ces constats sont instructifs mais n’ont aucune valeur probante faute d’études versus population tĂ©moin et versus autre mĂ©thode. [17] L’accompagnement en Actions. VidĂ©o FNG Accompagner la Vie Ă  Domicile. Maintenir la Relation ORRPA CLIC 51100. [18] Haley Jay. ThĂ©rapies orientĂ©es solution Problem solving therapy. Harper & Stratton, New York, 1976. [19] Feil Naomi, Validation, Lamarre, Rueil Malmaison, 2005. [20] Sauvy Jean, La maladie d’Alzheimer vĂ©cue Ă  deux, L’Harmattan, Paris, 2007. [21] Bobin Christian, La prĂ©sence pure. Le temps qu’il fait, Paris, 1999. 4e de couverture “Je dois rentrer pour nourrir mes enfants ! ” Je lui dis alors ” Madame Kessler, vous ne pouvez rentrer chez vous. Vos enfants ne sont pas lĂ . Vous ĂȘtes maintenant Ă  la maison de retraite de Montefiore “. Elle rĂ©pond ” Je le sais, ne soyez pas idiote. C’est pour ça que je dois partir tout de suite. Je dois rentrer chez moi pour faire manger mes enfants. ” Aucune forme de rĂ©fĂ©rence Ă  la rĂ©alitĂ© ne parvient Ă  convaincre Madame Kessler. Elle se sent inutile dans une maison de retraite. Elle a besoin de retrouver son rĂŽle de maman de trois enfants et sa maison pour se sentir utile. Elle s’écarte de moi en me pointant du doigt et marmonne ” Qu’est ce qu’elle en sait et pour qui elle se prend, celle lĂ  ! “. RĂ©orienter les vieillards dĂ©sorientĂ©s vers la rĂ©alitĂ©, entrer dans leur jeu, parler d’autre chose
 quelle est la bonne attitude ? Dans ce livre Naomi Feil nous expose les principes fondateurs de sa mĂ©thode, la Validation Therapy, basĂ©e sur une attitude empathique, respectueuse et authentique envers le vieillard dĂ©sorientĂ©. Ce livre est destinĂ© Ă  tous ceux qui prennent soin des ” Vieux vieux ” et les entourent quotidiennement. La mĂ©thode de Validation donne aux aidants des moyens pour ĂȘtre plus Ă  l’aise dans l’accompagnement de ces grands vieillards qui expriment leurs sentiments sans retenue. La Validation nous aide Ă  comprendre ce qui se cache derriĂšre certains comportements, souvent trĂšs choquants. L’auteur Naomi Feil est une psychosociologue amĂ©ricaine diplĂŽmĂ©e de l’universitĂ© de Colombia Ă  New-York. Elle a Ă©laborĂ© entre 1963 et 1980 une mĂ©thode destinĂ©e Ă  favoriser la communication avec les personnes ĂągĂ©es dĂ©sorientĂ©es. Et vous, quel est votre avis concernant cet ouvrage ? Pour vous procurer ce livre, cliquez sur l’image ci-dessous POURQUOI PARLER DE LA VALIDATION ? Le terme de Validation est Ă  la mode, et les soignants qui ont des dĂ©ments en charge ont bien peu de chance d’échapper Ă  cette notion. Il importe donc de savoir de quoi il s’agit. Mais la premiĂšre chose Ă  faire est de se mĂ©fier quand on Ă©tudie la psychologie amĂ©ricaine on est frappĂ© de la frĂ©quence Ă  laquelle on tombe sur la mĂȘme histoire une mĂ©thode Ă  la fois simple et profonde qui rĂ©volutionne la prise en charge des malades. Quand on regarde d’un peu plus prĂšs on s’aperçoit que toutes ces mĂ©thodes ont toujours quelques points communs Elles prĂ©tendent fournir une explication de toute une partie de la psychologie voire de toute l’aventure humaine. En fait elles sont bĂąties sur des thĂ©ories Ă  la soliditĂ© douteuse et qui relĂšvent davantage de la croyance, et se rĂ©duisent le plus souvent Ă  une accumulation d’évidences. Elles ont Ă©tĂ© crĂ©es par des individus seuls, qui en gĂ©nĂ©ral n’ont pas suivi des Ă©tudes classiques. Elles s’approprient le plus souvent des pans entiers de travaux dĂ©jĂ  connus. Elles demandent tout de mĂȘme une formation, gĂ©nĂ©ralement coĂ»teuse. Elles ne survivent guĂšre Ă  leur inventeur [1]. C’est le schĂ©ma qu’on retrouve notamment Ă  la base de la bio-Ă©nergie, du cri primal, et sans doute bientĂŽt de l’haptonomie mais beaucoup moins la sophrologie, par exemple c’est un comportement qui a plus Ă  voir avec celui des sectes qu’avec la recherche scientifique. Les travaux de Naomi Feil sont de cette sorte. Mais malgrĂ© toutes les critiques qu’on peut faire, il reste que les Ă©vidences dont elle parle sont bonnes Ă  se rĂ©pĂ©ter, et que celui qui se contente de faire ce qu’elle propose accomplit dĂ©jĂ  des progrĂšs importants. Naomi Feil n’est pas une soignante mais une travailleuse sociale amĂ©ricaine ; elle dit avoir mis au point des techniques simples pour communiquer avec les malades atteints de dĂ©mence ; en fait on constate assez rapidement que ce sont des techniques qui n’ont rien de spĂ©cifique, et qui peuvent ĂȘtre utilisĂ©es d’une maniĂšre ou d’une autre pour n’importe quelle communication avec n’importe qui. L’intĂ©rĂȘt de ces techniques est de pouvoir ĂȘtre utilisĂ©es par tous. Les intervenants aussi bien que les membres de la famille peuvent les mettre en pratique sans qu’il leur en coĂ»te plus de quelques minutes par jour. L’IDÉE GÉNÉRALE DE LA VAILDATION L’idĂ©e qui sous-tend cette approche est assez simple il s’agit d’essayer de prendre le dĂ©ment en somme lĂ  oĂč il est. Le plus souvent les intervenants conçoivent leur rĂŽle sur le mode de la rééducation, en cherchant Ă  faire retrouver au dĂ©ment un comportement normal, ou de la prĂ©servation, en essayant de freiner le processus dĂ©mentiel. Ce travail est important, et il doit ĂȘtre fait. Mais on voit tout de suite l’énorme inconvĂ©nient de cette approche elle revient Ă  dire au dĂ©ment Redeviens ce que tu Ă©tais, tu n’es plus toi-mĂȘme » ; et en disant cela on laisse de cĂŽtĂ© le fait que le dĂ©ment est d’abord quelqu’un, qu’il est vivant, qu’il s’exprime, et que ce qu’il dit a une valeur. Le dĂ©ment sait parfaitement qu’il est en train de perdre la tĂȘte [2]. Toute sa hantise est lĂ  peut-il encore s’exprimer, se faire comprendre ? Ce qu’il dit a-t-il encore un sens ? Chaque fois qu’on essaie de corriger ce qu’il dit on l’enfonce dans son dĂ©sarroi. Le propos de la validation est donc d’accepter la maniĂšre dont le dĂ©ment s’exprime, en disant que ce qu’il dit a un sens, une importance. Pour cela il faut rejoindre le dĂ©ment sur son terrain. Le dĂ©ment est dans son monde, il a du mal Ă  comprendre ce qui l’entoure, cela lui fait peur, et c’est la raison principale pour laquelle il se replie. L’erreur commise par les soignants est souvent de vouloir ramener le dĂ©ment Ă  la rĂ©alitĂ©, ce qui est trĂšs angoissant pour lui. On est plus efficace, plus aidant, en dĂ©cidant de le rejoindre lĂ  oĂč il se trouve, en lui disant qu’il a bien raison d’ĂȘtre comme il est, en reconnaissant que ce qu’il dit a un sens au lieu de lui renvoyer perpĂ©tuellement qu’on ne le comprend pas, bref en validant son comportement et son propos au lieu d’essayer de le corriger. Mais le projet de prendre le dĂ©ment lĂ  oĂč il est suppose qu’on prenne deux prĂ©cautions essentielles. La premiĂšre est de rester parfaitement sincĂšre prendre le dĂ©ment lĂ  oĂč il est ne veut pas dire qu’on rentre dans son jeu. Si le dĂ©ment dĂ©lire on n’a pas le droit de dĂ©lirer avec lui valider c’est reconnaĂźtre au malade le droit de penser ce qu’il pense ; ce n’est en aucun cas faire mine de penser la mĂȘme chose. Nous en verrons des exemples chemin faisant. La seconde prĂ©caution Ă  respecter pour prendre le malade lĂ  oĂč il est est Ă©videmment de s’en donner les moyens, ce qui suppose qu’on comprenne, prĂ©cisĂ©ment, oĂč il en est. LES THÉORIES DE LA RÉGRESSION La notion de rĂ©gression est une notion capitale en psychanalyse. La psychanalyse Lorsque je me trouve devant un problĂšme, je dispose de deux stratĂ©gies. La premiĂšre est de rĂ©soudre le problĂšme en inventant une solution ; cela s’appelle l’imagination, c’est la stratĂ©gie la plus efficace, c’est aussi la plus coĂ»teuse ; en psychanalyse cela s’appelle sublimation. La seconde est de chercher dans le passĂ© si je n’ai pas dĂ©jĂ  Ă©tĂ© confrontĂ© Ă  une situation semblable ; j’essaie alors des solutions comme le serrurier essaie des clĂ©s lorsque je perds mes clĂ©s j’appelle un serrurier ; ce serrurier vient avec un lot de clĂ©s et cherche Ă  ouvrir la porte en essayant diverses clĂ©s ; c’est moins efficace car les situations ne sont jamais totalement identiques, mais c’est moins coĂ»teux ; cela s’appelle l’expĂ©rience ; en psychanalyse on appelle cela rĂ©gression car la solution que je vais appliquer est une solution que j’ai trouvĂ©e dans un passĂ© parfois fort ancien. L’inconvĂ©nient de la rĂ©gression est double d’une part, comme on l’a dit, la solution que je trouve alors n’est pas parfaitement adaptĂ©e au problĂšme qui m’est posĂ© ; d’autre part lorsque j’applique une solution issue du passĂ© j’ai tendance Ă  adopter aussi l’état d’esprit qui Ă©tait le mien Ă  cette Ă©poque-lĂ . C’est ainsi qu’on peut comprendre, par exemple, une partie du comportement de l’alcoolique il se trouve incapable d’affronter les problĂšmes de la vie, et il rĂ©gresse jusqu’à ce qu’il trouve une solution. Et la solution qu’il trouve est de se comporter comme lorsqu’il Ă©tait bĂ©bĂ©, et qu’il suffisait d’un biberon pour apaiser son angoisse. Le problĂšme est qu’il adopte alors un comportement de bĂ©bĂ© dans tous les domaines de sa vie, mĂȘme dans ceux qui ne sont pas directement liĂ©s Ă  la boisson. Il va de soi que le dĂ©ment est particuliĂšrement exposĂ© au risque de rĂ©gression, puisque le problĂšme qui lui est posĂ© du fait de son effondrement intellectuel ne possĂšde aucune solution. Il ne peut donc espĂ©rer en inventer une, et ce d’autant moins que pour inventer une solution il faudrait prĂ©cisĂ©ment qu’il ait un cerveau en bon Ă©tat. Il existe un certain nombre de thĂ©ories qui prĂ©tendent expliquer l’état d’esprit du dĂ©ment. Toutes sont basĂ©es sur l’idĂ©e que le dĂ©ment, en somme, retombe en enfance, et que cette retombĂ©e a des chances de se produire comme une rĂ©gression, comme si le dĂ©ment parcourait Ă  l’envers le chemin de la vie ; Ă  tout le moins cela demande preuve revenir en arriĂšre n’est pas le contraire de marcher en avant c’est parcourir Ă  l’envers un chemin qu’on a dĂ©jĂ  parcouru une fois mais peu importe. Le plongeon rĂ©trograde Une thĂ©orie solide est celle du plongeon rĂ©trograde, de Daniel Taillefer, psychologue canadien, et qui s’appuie sur les travaux de Reisberg. Ce dernier a essayĂ© de classer la dĂ©tĂ©rioration intellectuelle en 7 stades selon la gravitĂ© de la perte. L’échelle de Reisberg s’établit comme suit Stade 1 Aucune dĂ©tĂ©rioration. Stade 2 Manque du mot lĂ©ger plainte subjective concernant des troubles de mĂ©moire. Stade 3 DĂ©ficits de fonctionnement au travail, notamment dĂ©but de la dĂ©sorientation. Stade 4 Assistance requise aux tĂąches complexes. Stade 5 Assistance requise dans certaines dĂ©cisions de la vie quotidienne. Stade 6 Malade assistĂ© en permanence. Stade 7 Stade terminal. On voit tout de suite que ces stades sont tout de mĂȘme trĂšs approximatifs. D’abord ils ne sont pas trĂšs bien adaptĂ©s Ă  la rĂ©alitĂ© Rien ne prouve que le sujet de stade 2 est sur le chemin de la dĂ©mence. Le trouble du langage est loin de toujours prĂ©cĂ©der la dĂ©sorientation ou la perte des habiletĂ©s. Le manque de mot et le trouble de la mĂ©moire ne peuvent pas ĂȘtre reliĂ©s si facilement l’un n’est pas la cause de l’autre. D’autre part dans la pratique ils ne sont pas si utiles que cela ; mais enfin ils permettent d’y voir un peu plus clair, et de se parler commodĂ©ment entre soignants. Daniel Taillefer explique que chez le sujet atteint de dĂ©mence de type Alzheimer le cerveau parcourt Ă  l’envers le chemin de sa vie dans une sorte de rĂ©gression au sens psychanalytique du terme. Les stades de Reisberg seraient grossiĂšrement corrĂ©lĂ©s aux pĂ©riodes de l’existence qui sont ainsi revĂ©cues dans le souvenir. La correspondance des Ăąges et de la mĂ©moire s’établirait ainsi Stades 1 et 2 Pas de rĂ©gression. Stade 3 66 ans et plus. Stade 4 56 Ă  65 ans. Stade 5 48 Ă  55 ans. Stade 6 18 Ă  45 ans. Stade 7 0 Ă  15 ans. Donc un malade en stade 5, qui sait encore accomplir certaines tĂąches Ă©lĂ©mentaires de la vie quotidienne mais pas toutes pourra Ă©voquer facilement ses souvenirs de la quarantaine, et on le stimulera davantage en lui parlant de cette pĂ©riodes ; sur le plan du comportement il aura tendance Ă  se conduire de la mĂȘme maniĂšre qu’à cette Ă©poque-lĂ . C’est du moins ce que prĂ©voit la thĂ©orie. Que peut-on en pratique tirer de cette approche ? Probablement une chose trĂšs simple la dĂ©tĂ©rioration intellectuelle s’accompagne d’une rĂ©gression. Il est fĂ©cond pour le soignant de repĂ©rer cette rĂ©gression, et par des moyens trĂšs simples de tenir compte, pour entrer en communication, du stade oĂč il se trouve. Si on sait que le dĂ©ment se trouve dans l’univers de son adolescence, cela permet de s’orienter on peut choisir de s’installer avec lui dans cette couche de souvenirs, et les Ă©voquer systĂ©matiquement avec lui ; on peut au contraire essayer de l’en sortir pour parler d’autre chose les deux mĂ©thodes sont Ă©galement bonnes, mais il faut simplement savoir que les rĂ©sultats ne sont pas les mĂȘmes. On peut aussi comprendre que les souvenirs qu’il Ă©voque entraĂźnent des Ă©motions et des comportements qui sont liĂ©s Ă  cette Ă©poque ; on pourrait mĂȘme utiliser cette notion en adaptant son propre comportement si le patient se conduit comme un enfant face Ă  sa mĂšre le soignant peut jouer Ă  ĂȘtre une mĂšre aimante, autoritaire... Cela est simplement interdit car il s’agit alors de ce que les psychanalystes appellent utilisation du transfert et cela demande une formation trĂšs poussĂ©e. La thĂ©orie d’Erikson Naomi Feil fonde toute son approche sur la thĂ©orie d’Erik Erikson qui traite des stades de dĂ©veloppement de la vie et des tĂąches qui doivent ĂȘtre accomplies Ă  chacun de ces stades. Cette thĂ©orie veut qu’il y ait six pĂ©riodes de la vie, et qu’à chacune ce ces pĂ©riodes corresponde une tĂąche Ă  accomplir. Naturellement l’épanouissement de la personne Ă  un stade donnĂ© dĂ©pend beaucoup de la maniĂšre dont elle a rĂ©ussi les tĂąches qu’elle devait accomplir aux stades prĂ©cĂ©dents, et Erikson en tire des conclusions qui font que sa mĂ©thode se rapproche beaucoup de la psychanalyse, dont elle est d’ailleurs largement inspirĂ©e. Donc il y a six pĂ©riodes de la vie, et comme chez Taillefer le dĂ©ment a tendance Ă  rĂ©gresser, parcourant lĂ  aussi ces six pĂ©riodes dans une sorte de plongeon rĂ©trograde. La rĂ©partition d’Erikson se fait comme suit 1. Prime enfance Le sujet doit apprendre Ă  faire confiance quand il y a frustration. S’il Ă©choue le sentiment est la dĂ©fiance je ne suis pas aimĂ©. 2. Enfance le sujet doit apprendre Ă  se contrĂŽler, Ă  suivre des rĂšgles. S’il rĂ©ussit le sentiment est la joie d’y parvenir. S’il Ă©choue le sentiment est la honte, la culpabilitĂ©, le reproche Je souille tout. 3. Adolescence le sujet doit construire sa personnalitĂ©. S’il rĂ©ussit il trouve sa propre identitĂ© ; il se dĂ©tache des parents. S’il Ă©choue le sentiment est l’insĂ©curitĂ© ; dĂ©lĂ©gation de rĂŽle je ne suis quelqu’un que si je suis aimĂ©. 4. Âge adulte le sujet doit Ă©tablir une relation d’intimitĂ© avec un autre ĂȘtre humain. Partage des premiers sentiments, sujet responsable de ses Ă©motions, de ses erreurs et de ses succĂšs. S’il Ă©choue le sentiment est l’isolement, dĂ©pendance. 5. MaturitĂ© le sujet doit produire de nouvelles activitĂ©s quand les anciennes sont dĂ©passĂ©es ; se tourner vers quelque chose de nouveau. S’il Ă©choue le sentiment est la stagnation. Fixation sur des rĂŽles dĂ©passĂ©s. 6. Vieillesse le sujet doit Boucler sa vie. Trouver la force intĂ©rieure, l’intĂ©gritĂ©. MĂ©langer le passĂ© au prĂ©sent, se donner de nouveaux buts. S’il Ă©choue le sentiment est le dĂ©sespoir Je ferais mieux d’ĂȘtre mort ». L’idĂ©e de Naomi Feil est qu’en analysant le comportement du dĂ©ment on peut arriver Ă  comprendre quel est le type de problĂšme qu’il cherche Ă  rĂ©soudre, et par lĂ  Ă  comprendre Ă  quel niveau de rĂ©gression il est arrivĂ©. Par exemple cette vieille dame accumule des objets, au besoin les vole et les entasse dans sa chambre. Elle donne l’impression qu’elle le fait pour se prouver qu’elle est quelqu’un. L’idĂ©e est que quand elle Ă©tait une petite fille elle n’a jamais appris Ă  faire confiance. Il est probable qu’on retrouvera facilement chez elle des souvenirs, des comportements, des attitudes qui datent de cette Ă©poque-lĂ , et il faudra tenir compte de cette donnĂ©e pour amĂ©liorer la communication. Ailleurs c’est un vieux malade qui s’attachant aux pas d’un intervenant ou d’un membre de sa famille ; on pense qu’il cherche l’approbation de cet intervenant qui reprĂ©sente pour lui l’autoritĂ© parentale on dirait un adolescent qui n’a jamais pu se dĂ©tacher de ses parents. On voit trĂšs vite les trois grandes critiques qu’on peut faire Ă  la thĂ©orie de Naomi Feil 1. Ce qu’elle Ă©nonce n’est rien d’autre que la thĂ©orie de la rĂ©gression qui est Ă  la base de la psychanalyse on peut dire la mĂȘme chose de la thĂ©orie du plongeon rĂ©trograde. 2. Elle a raison d’insister sur la nĂ©cessitĂ© d’analyser le comportement du malade. Mais il n’est pas difficile de voir que cette analyse est trĂšs imprĂ©cise, et que les interprĂ©tations donnĂ©es par les soignants seront toujours risquĂ©es et toujours discutables. 3. Elle en vient trĂšs vite Ă  dire qu’il est possible d’aider la personne dĂ©mente Ă  rĂ©soudre les problĂšmes qu’elle n’a pas su rĂ©gler jusque lĂ . On l’espĂšre, mais sans trop y croire c’est une autre constante de ces thĂ©ories amĂ©ricaines que de prĂ©tendre rĂ©ussir des miracles. Bref, l’idĂ©e intĂ©ressante est que si nous parvenons Ă  repĂ©rer Ă  quel niveau le malade se situe nous allons pouvoir mieux le comprendre, et par lĂ  Ă©tablir une relation plus apaisante pour lui. Nous allons donc procĂ©der en deux temps Dans un premier temps nous allons Ă©couter le patient et essayer de comprendre de quels souvenirs il nous parle. Dans un second temps nous allons essayer de comprendre quel est son comportement, et en quoi il rappelle une pĂ©riode de sa vie. Ensuite nous utiliserons les rĂ©sultats de cette enquĂȘte pour essayer de trouver le comportement qui permettra Ă  la personne de se sentir comprise et apprĂ©ciĂ©e pour ce qu’elle est. En somme pour trouver la clĂ© qui permet de calmer la personne, il suffit de l’écouter vraiment, d’entendre ce qui cherche Ă  se dire Ă  travers son comportement, mĂȘme quand il est dĂ©rangeant ». Le projet de Naomi Feil est de suivre pas Ă  pas, Ă  travers des contacts quotidiens avec les personnes souffrant de dĂ©mence, le fil conducteur des ressentis dans le labyrinthe des Ă©motions. Dans la validation, ce qu’on valide c’est le comportement du malade on ne cherche plus Ă  le rectifier, on le reconnaĂźt comme un comportement lĂ©gitime et qui dit quelque chose. LES OUTILS DE VALIDATION Naomi Feil dĂ©crit quatorze outils de validation. Ces outils ne sont pas tous originaux, on le soulignera Ă  l’occasion ; d’autres sont carrĂ©ment douteux... En fait ce sont le plus souvent des banalitĂ©s ; redisons que ces banalitĂ©s sont bonnes Ă  entendre. Disons tout d’abord que le soignant intervient dans deux contextes Lors de relations spontanĂ©es en cours de journĂ©e. Lors d’interventions programmĂ©es. Le soignant doit d’abord maĂźtriser l’intervention programmĂ©e, celle qu’il a prĂ©vue et pour laquelle il a le temps. Quand il sera bien habituĂ© Ă  ce type d’intervention il aura acquis la fluiditĂ© et l’aisance nĂ©cessaires pour amĂ©liorer ses relations spontanĂ©es. Les techniques de Naomi Feil sont prĂ©sentĂ©es ici dans un ordre logique, et ont Ă©tĂ© dĂ©barrassĂ©es de ce qu’elles contiennent de trop discutable. Cette prĂ©sentation n’est donc pas... validĂ©e on ne prĂ©sente lĂ  qu’une opinion. Se concentrer Il ne s’agit absolument pas d’une technique de communication mais d’un prĂ©alable. Il est trĂšs important de se concentrer avant d’entrer dans une relation qui risque d’ĂȘtre difficile ou Ă©prouvante. C’est le cas en accompagnement, quand on entre dans la chambre du mourant on fera du mauvais travail si on ne prend pas le temps de se dĂ©barrasser de ses propres problĂšmes. Il existe de multiples techniques de concentration, toutes plus ou moins inspirĂ©es du yoga. Il ne faut pas les valoriser outre mesure, ce n’est pas de la magie. Voici les recommandations de Naomi Feil pour l’utilisation de cette technique Regarder fixement un point situĂ© environ 5 cm en dessous de sa propre taille. Inspirer profondĂ©ment par le nez et emplir d’air ses poumons. Expirer par la bouche. Supprimer toute rĂ©flexion intĂ©rieure, pour consacrer toute son attention Ă  sa seule respiration. Par huit fois, rĂ©pĂ©ter lentement cette procĂ©dure. Ceci permet de se mettre vraiment Ă  l’écoute de l’autre, en expulsant tous les sentiments de peine, de colĂšre et de frustration, afin de les mettre au placard pour un moment. La validation devrait toujours commencer par cette technique. Capter le regard du patient Le dĂ©ment reste trĂšs longtemps, sans doute jusqu’au bout, sensible aux Ă©lĂ©ments de la communication non-verbale. Parmi ceux-ci le regard est important. Quand on entre en communication il faut Ă©viter tout ce qui ressemble Ă  un rapport de force. Or en matiĂšre de comportement animal le signe de la domination est la place des yeux si mon interlocuteur est placĂ© de telle sorte que je le regarde de haut en bas, je le domine, et il se trouve en position d’infĂ©rioritĂ©. Naturellement cette rĂšgle n’est pas absolue, et ne fait que nuancer le rapport de force l’enseignant est debout devant des Ă©lĂšves assis, de sorte qu’il les regarde de haut en bas. Par contre le patron qui reçoit un employĂ© est assis, et l’employĂ© est debout, de sorte que le patron le regarde de bas en haut ; pourtant le rapport de force est en faveur du patron, parce qu’ĂȘtre assis est un privilĂšge. Dans les deux cas, donc la position renforce l’autoritĂ© de celui qui la possĂšde. Il s’ensuit que la seule maniĂšre d’éviter l’aggravation du rapport de force est d’ĂȘtre situĂ© Ă  la mĂȘme hauteur que celui Ă  qui on s’adresse. Cela signifie par exemple qu’il n’est pas sain de converser avec le dĂ©ment en se mettant assis sur le bord du lit il faut faire l’effort de se baisser jusqu’à ce qu’on ait les yeux exactement Ă  sa hauteur. On sait que les regards sont capables d’exprimer un trĂšs grand nombre de sentiments. On sait moins comment c’est possible le regard lui-mĂȘme n’est le fait que de l’Ɠil, et l’Ɠil ne se modifie que trĂšs peu seul le diamĂštre de la pupille peut changer, et cela dĂ©pend surtout de la luminositĂ©... C’est donc l’Ɠil qui porte le message et non le regard autrement dit ce sont les paupiĂšres et les mouvements des globes. Le regard est un enjeu fondamental de la communication avec le dĂ©ment, car c’est l’instrument qui permet de fixer son attention. C’est par le regard qu’il conserve la notion d’une prĂ©sence humaine prĂšs de lui la parole est faite de mots qu’il ne comprend plus trĂšs bien, ou plus du tout ; le toucher est trop peu spĂ©cifique. Il faut donc capter l’attention du dĂ©ment en se plaçant face Ă  lui, et en le regardant dans les yeux ; Ă  condition bien sĂ»r de veiller Ă  ce que le regard ne soit en aucune façon agressant ou angoissant. Il est plus difficile de maintenir ce regard tout au long de l’entretien, il faut pourtant s’y exercer. On ne doit pas craindre de pratiquer l’échange des regards avec le dĂ©ment non communiquant on peut essayer d’exprimer des Ă©motions par le seul regard, et d’interprĂ©ter les Ă©motions qu’on reçoit en retour. On aura souvent la bonne surprise de constater que les yeux parviennent ainsi Ă  se parler. Naturellement de telles expĂ©riences ont quelque chose de douteux en communication non-verbale rien n’est plus facile que de prendre ses dĂ©sirs pour des rĂ©alitĂ©s. Mais on peut au moins prĂ©sumer que mĂȘme si on se trompe quelque peu en interprĂ©tant les rĂ©actions du dĂ©ment ce dernier aura tirĂ© quelque avantage du fait qu’on lui aura consacrĂ© ce temps. Penser autrement reviendrait Ă  dĂ©nier au fond toute valeur Ă  notre action envers le dĂ©ment. Parler d’une voix claire, basse et affectueuse Dans une conversation, il y a les mots qui sont prononcĂ©s, avec leur signification, ce qui forme le contenu du message. Mais il y a aussi, nous le savons bien, la maniĂšre dont les mots sont prononcĂ©s le travail sur l’intonation est la base du mĂ©tier d’acteur. Allons plus loin la tonalitĂ© de mon message contient des informations, et ces informations sont souvent au moins aussi importantes que le contenu objectif des mots on a tort d’opposer comme on le fait le fond et la forme ces deux notions sont totalement interdĂ©pendantes. Cela est d’autant plus vrai chez le dĂ©ment Il est en difficultĂ© pour comprendre le fond du message, car il ne connaĂźt plus le sens des mots. Comme il ne comprend plus le sens des mots, il est encore plus sensible Ă  leur environnement affectif. Il est en souffrance, et de ce fait hypersensible Ă  tout ce qui constitue l’ambiance affective de la relation. Il importe donc d’adopter un ton de voix rassurant ; cela suppose de parler lentement, doucement, sans Ă©lever la voix. Il faut s’y exercer. Il faut savoir, avant d’entamer la conversation, prendre le temps de se recentrer sur soi-mĂȘme et de se prĂ©parer. Mais cette rĂšgle est rapidement limitĂ©e 1. Les modalitĂ©s concrĂštes du travail ne laissent pas toujours le temps de se mettre en condition. 2. Le dĂ©ment est souvent sourd, ce qui impose de lui parler fort. 3. Ce qu’on veut dire au malade n’est pas forcĂ©ment compatible avec une douceur du ton. Certes on peut toujours s’efforcer de rester calme, mais il ne faut pas qu’il y ait une trop grande contradiction entre ce qu’on veut dire et la maniĂšre dont on va le dire, faute de quoi le dĂ©ment va s’y perdre il y a en somme des maniĂšres angoissantes d’éliminer l’angoisse. 4. Mais d’un autre cĂŽtĂ© parler de maniĂšre douce et chaleureuse ne veut pas dire adopter un ton lĂ©nifiant ou infantilisant. Le ton juste serait plus prĂšs de celui du psychiatre que de celui de la nourrice. 5. Il n’est pas si simple de trouver le ton juste le pire serait d’adopter un ton si neutre qu’il n’exprimerait aucun sentiment, ce qui serait particuliĂšrement angoissant. Il faut donc prendre garde Ă  ne pas Ă©liminer du ton de la voix toute trace de sentiment il s’agit d’avoir un ton bienveillant, non un ton neutre ou indiffĂ©rent. Notons d’autre part que le fait d’adopter un ton de voix rassurant va organiser la rĂ©gression dans deux directions Le patient va entendre un soignant qui lui parle comme aurait fait sa mĂšre. Cela ne manquera pas de dĂ©clencher chez lui des attitudes semblables Ă  celle qu’il aurait eue avec sa propre mĂšre, et de le renvoyer dans le monde de son enfance, avec les souvenirs de son enfance. Le soignant qui adopte un ton de voix maternel va se retrouver dans la position qu’il adopterait vis-Ă -vis de son enfant, ce qui n’est pas sans danger accessoirement il pourra Ă©galement retrouver des comportements qui tĂ©moignent de ce qu’il a vĂ©cu avec sa propre mĂšre.... Identifier et utiliser le sens prĂ©fĂ©rĂ© Il s’agit de ce qu’on appelle les canaux de communication. Si on veut vraiment parler la langue d’une autre personne et entrer dans son monde afin de gagner sa confiance, la meilleure façon de faire est d’apprendre Ă  percevoir le monde comme elle le perçoit. Pour ce faire, il faut se mettre Ă  l’écoute et observer attentivement. Les paroles et les actions finiront par dĂ©voiler lequel de ses cinq sens la vue, l’ouĂŻe, le goĂ»t, l’odorat et le toucher la personne utilise le plus dans ses expĂ©riences de la vie au quotidien. Le langage tĂ©moigne facilement du canal de communication prĂ©fĂ©rĂ© de la personne. Il suffit de faire attention aux mots qu’elle utilise ils traduisent sa maniĂšre de percevoir le monde. L’expĂ©rience la plus simple est de faire raconter une scĂšne donnĂ©e, par exemple un mariage. On verra vite que les divers participants sont capables de raconter correctement le mĂȘme mariage mais que chacun insistera d’abord sur des points particuliers La robe de la mariĂ©e Vision Le repas GoĂ»t L’orchestre Audition Le parfum des tilleuls Odorat Le velours des siĂšges Toucher Mais les choses vont beaucoup plus loin, et sont beaucoup plus subtiles, car la question des canaux de communication imprĂšgne et structure tout le langage. Par exemple pour dire son aversion pour quelqu’un, on peut employer des canaux diffĂ©rents Je ne m’entends pas avec lui Audition Je ne peux pas le voir Vision Je ne peux pas le sentir Odorat Il me hĂ©risse ; Toucher Il me dĂ©goĂ»te GoĂ»t Une fois le sens privilĂ©giĂ© connu, l’intervenant qui se sert de la Validation se servira des mots clĂ©s qui correspondent Ă  ce sens en s’adressant Ă  la personne atteinte. Pour une personne qui utilise plus la vue pour comprendre son environnement, on pourra dire J’ai bien vu ça, moi aussi » ; pour une autre qui utilise plutĂŽt l’ouĂŻe, on dira Je vous entends clairement » ; et pour une personne dont le sens du toucher est prĂ©dominant C’est doux, n’est-ce pas ? » et ainsi de suite. Toucher Cette technique s’applique bien avec les personnes qui Ă©prouvent de la difficultĂ© Ă  voir et Ă  entendre, dont la perception du temps est affectĂ©e, et qui sont incapables de reconnaĂźtre les gens, peu importe qu’ils soient des proches ou des Ă©trangers. Le contact tactile devient donc un mode important par lequel on peut communiquer son affection ou du respect Ă  ces personnes, ce qui a souvent comme rĂ©sultat de crĂ©er des liens serrĂ©s entre ces personnes et les intervenants utilisant cette approche. Lorsque la personne est encore plus refermĂ©e sur elle-mĂȘme et qu’elle ne semble plus se prĂ©occuper de ce qui l’entoure, le toucher permet d’entrer dans son monde ; ainsi des souvenirs agrĂ©ables de la tendre enfance sont ravivĂ©s Ă  travers le toucher. Tout en respectant l’intimitĂ© de la personne, on peut, par exemple, faire des mouvements circulaires du bout des doigts sur le haut de la joue ou derriĂšre la tĂȘte. Ou alors, en se servant des deux mains, une sur chaque cĂŽtĂ© du visage, on peut toucher le lobe de l’oreille avec l’auriculaire, et descendre ensuite le revers des mains le long de la mĂąchoire jusqu’au menton pour ensuite descendre le long du cou. On peut Ă©galement masser les Ă©paules, le haut du dos, ou toucher le bas du mollet avec le bout des doigts. Il est cependant important de toujours approcher la personne de face car on peut la surprendre en arrivant de cĂŽtĂ© ou par en arriĂšre. Il est tout aussi important de respecter l’état d’esprit de la personne en l’approchant, et d’ĂȘtre sensible Ă  tout signe de rĂ©sistance car ce ne sont pas toutes les personnes qui aiment ĂȘtre touchĂ©es. Le choix des mots pour crĂ©er la confiance Il faut comprendre ce qui va mettre le dĂ©ment en difficultĂ©. En gros il lui est assez facile de parler de ce qu’il voit, nettement moins de ce qu’il pense ; il sait dĂ©crire, mais pas analyser. Il faut donc utiliser des mots simples, qui n’ouvrent pas la porte Ă  des Ă©motions trop difficiles Ă  affronter. Par exemple les questions Qui ? Quoi ? OĂč ? Quand ? Comment ? sont assez facilement traitĂ©es par le malade, alors que la question Pourquoi ? la met tout de suite en difficultĂ© le malade se sent acculĂ© au pied du mur lorsqu’on lui demande pourquoi il a fait ce qu’il a fait, ou pourquoi un Ă©vĂ©nement est arrivĂ©. On lui demande alors de motiver ses gestes ou ses paroles, c’est-Ă -dire de rĂ©flĂ©chir sur lui-mĂȘme, ce qui lui est trĂšs difficile ; et s’il le fait il risque de se retrouver sur le chemin de sentiments souvent porteurs d’une grande charge Ă©motive, ce qui va lui faire peur. Naomi Feil donne l’exemple suivant une dame de 80 ans prĂ©tend que quelqu’un lui dĂ©robe ses bijoux. PlutĂŽt que de discuter avec elle, sa fille concentre la discussion sur des faits prĂ©cis. Qui accuses-tu de te dĂ©rober tes bijoux, Maman ? », demande-t-elle. La mĂšre est intĂ©ressĂ©e par la question et lui rĂ©pond C’est la femme de mĂ©nage. » Que dis-tu donc qu’elle t’a volĂ© ? » demande la fille, en continuant Ă  focaliser sur des faits. La derniĂšre chose qu’elle m’a volĂ©e, ce sont mes boucles d’oreilles noires celles que Papa m’a donnĂ©es. » Ce sont tes prĂ©fĂ©rĂ©es », rĂ©pond la fille. Papa te donnait toujours de jolies choses. Il savait bien ce qui t’allait le mieux. Quand te les avait-il donnĂ©es ? » Juste aprĂšs notre mariage, pendant notre lune de miel », rĂ©pond la mĂšre. Ici on commence Ă  voir ce qu’est le mĂ©canisme de validation l’intervenante n’a pas cherchĂ© Ă  dĂ©tromper la malade, elle n’a pas cherchĂ© Ă  la rassurer ; rassurer la patiente revenait Ă  lui dire qu’elle avait tort ; or ce qui importe le plus au dĂ©ment c’est d’avoir raison. Pour y parvenir l’intervenante a acceptĂ© de ne pas se demander si la colĂšre de sa mĂšre Ă©tait justifiĂ©e elle lui a simplement reconnu le droit d’ĂȘtre en colĂšre. Et dĂšs qu’elle a vu sa colĂšre validĂ©e, la mĂšre n’en a plus eu besoin, elle a pu cesser d’accuser la femme de mĂ©nage et il est devenu facile de la faire dĂ©river jusqu’au point oĂč elle pouvait se mettre Ă  Ă©voquer le souvenir de son mari. Reformuler La personne atteinte se sent comprise si ses mots sont repris par quelqu’un d’autre. Cela la rassure. On peut dire la phrase en utilisant les mĂȘmes mots-clĂ©s et en rĂ©pĂ©tant l’essentiel. Imiter le ton de la voix et le dĂ©bit est aussi un excellent moyen de montrer Ă  la personne atteinte qu’on la comprend et qu’on est sensible Ă  sa rĂ©alitĂ©. La reformulation est une mĂ©thode Ă  part entiĂšre, et une sĂ©ance y sera probablement consacrĂ©e. Naomi Feil donne l’exemple d’un vieil homme qui accuse son garagiste de lui abĂźmer sa voiture ». Cette accusation est totalement fausse, et le garagiste devrait se dĂ©fendre. Mais ce dernier se rend compte que quelque chose ne va pas en fait il a l’intuition que le vieil homme s’identifie sa voiture ; Ainsi, lorsqu’il dit au garagiste qu’il ne comprend pas pourquoi sa voiture a besoin de rĂ©parations elle allait pourtant bien la semaine derniĂšre... », il est en rĂ©alitĂ© en train de lui dire sa frustration face au fait qu’il ne se sent pas aussi bien qu’avant. Sa voiture sert de prĂ©texte Ă  masquer ces pertes qui l’affectent profondĂ©ment. Au fond de lui, le vieil homme sait que sa vue baisse et qu’il perd peu Ă  peu son sens de l’orientation. Il se sent usĂ©, tout comme la boĂźte de vitesses de sa voiture. Le garagiste sent ce que le vieil homme lui dit vraiment et du coup il n’argumente pas. Il va utiliser une autre technique qui est celle de la reformulation il va simplement rĂ©pĂ©ter les mots du vieil homme, ce qui lui montre qu’il l’a entendu, qu’il l’a compris, que ses mots peuvent ĂȘtre dits par d’autres ; et cela va encourager le vieil homme Ă  aller plus loin, jusqu’à dire le fond de sa pensĂ©e ce que le malade dit a un sens, cela peut ĂȘtre Ă©changĂ©. Vous m’avez abĂźmĂ© ma voiture. Vous pensez que je vous ai abĂźmĂ© votre voiture ? reformulation Ă©cho Bien sĂ»r ! la semaine derniĂšre elle marchait encore trĂšs bien ! J’ai l’impression que vous ĂȘtes trĂšs troublĂ© par cela reformulation du non-verbal. Oui, ce n’est pas normal, ce n’est pas parce qu’elle est vieille qu’elle doit tomber en panne. Ce n’est pas une explication... reformulation ouverture. Non, bien sĂ»r ! Tenez moi j’ai quatre-vingts ans, eh bien je suis en pleine forme. Vous vous sentez trĂšs bien. Remarquez, on ne sait jamais... Etc... Utiliser la polarisation Cette technique consiste Ă  laisser la personne atteinte exprimer sa frustration sur un objet ou une situation alors que nous savons que ce n’est pas la cause du problĂšme. Par exemple, lorsque la dame se plaint des plats servis Ă  table, on lui demande Vous trouvez que c’est le plus mauvais jambon que vous ayez jamais mangĂ©, n’est-ce pas ? » Nous savons bien qu’au fond, elle en a contre ses dents qui ne lui permettent plus de mastiquer comme avant. Mais en la laissant s’exprimer et s’emporter contre la nourriture, son anxiĂ©tĂ© a diminuĂ© et elle en a ressenti un certain soulagement. Il faut bien comprendre pourquoi cette technique est efficace. Et il y a trois grands mĂ©canismes 1. D’abord il y a le mĂ©canisme gĂ©nĂ©ral de la validation on a reconnu Ă  la dame le droit d’ĂȘtre en colĂšre, et c’est ce qui importait. C’est la condition pour qu’elle puisse Ă©ventuellement dĂ©river vers la vraie cause comme dans l’exemple du bijou volĂ©. 2. Ensuite il y a la validation du subterfuge la grand-mĂšre a sans doute besoin de se dire qu’elle est encore capable de sauver les apparences et de duper son monde. 3. Enfin il y a le mĂ©canisme de toute colĂšre la colĂšre est une Ă©motion, qui demande Ă  ĂȘtre dĂ©versĂ©e. Une fois cela accompli, la patiente se dĂ©tend. Évidemment il est plus facile de tolĂ©rer une injustice contre un jambon que contre un soignant, mais c’est une autre question. Imaginer le contraire et faire se souvenir Parfois, il faut essayer d’imaginer le contraire de la situation vĂ©cue » par la personne, ce qui lui permet de retrouver une solution faire se souvenir qu’elle a autrefois utilisĂ©e pour rĂ©gler la situation. Ces techniques peuvent redonner confiance en elle-mĂȘme Ă  la personne atteinte et en celui ou celle qui l’accompagne. Par exemple, une malade dit Un homme vient dans ma chambre la nuit. » Utiliser la technique du contraire » c’est essayer de l’amener Ă  se rappeler les occasions oĂč l’homme n’est pas venu. Le voyez-vous toutes les nuits ? » La dame, surprise, constate que l’autre soir, quand nous sommes venu la visiter et qu’elle a veillĂ© tard, il n’était pas lĂ . Pourtant, dĂšs qu’elle a Ă©tĂ© seule il Ă©tait revenu. Alors c’est seulement quand vous ĂȘtes seule que vous le voyez ? Si nous Ă©tions avec vous tout le temps, cela ne vous importunerait plus ? » La dame acquiesce et raconte qu’elle n’a jamais Ă©tĂ© seule de sa vie et combien elle s’est sentie abandonnĂ©e Ă  la mort de son mari, qui avait toujours Ă©tĂ© Ă  ses cĂŽtĂ©s. Doucement, on demande Ă  la dame ce qu’elle a fait Ă  ce moment-lĂ  pour se sentir moins seule faire se souvenir. Elle rĂ©pond qu’elle passait ses nuits entiĂšres Ă  regarder les vieilles photos de son mari en Ă©coutant la musique qu’il aimait. On voit facilement comment cette technique fonctionne le fait d’imaginer le contraire permet Ă  la personne ĂągĂ©e de prendre de la distance vis-Ă -vis de la situation angoissante. En Ă©voquant une situation oĂč l’homme n’est pas lĂ  on permet Ă  la dame de constater qu’il n’est pas toujours lĂ  et que donc il n’envahit pas tout l’espace il y a de la place pour penser Ă  autre chose. La technique du souvenir est beaucoup plus banale ; encore faut-il bien comprendre ce qu’on fait quand on l’utilise. Au moment du grand Ăąge, il n’est plus possible d’apprendre des façons nouvelles de se dĂ©brouiller ». L’avenir, mais aussi le prĂ©sent sont des mondes angoissants. Par contre parler du passĂ© est un excellent moyen d’instaurer un climat de confiance. Cela aide Ă©galement Ă  s’adapter Ă  une situation de crise, Ă  un stress ou Ă  une vive Ă©motion. Cela n’est pas simple il n’est pas si facile de parler du passĂ© Ă  quelqu’un Ă  qui la mĂ©moire commence Ă  faire dĂ©faut. Mais enfin dans la mesure oĂč le patient se souvient, et surtout dans la mesure oĂč on ne le confronte pas Ă  ses Ă©checs, on peut arriver Ă  le sĂ©curiser. Naturellement ces deux techniques sont employĂ©es l’une Ă  la suite de l’autre. Utiliser l’ambiguĂŻtĂ© Lorsque la personne atteinte utilise des mots incomprĂ©hensibles, l’intervenant qui connaĂźt la Validation peut prendre part Ă  la conversation sans la contredire. Ainsi, l’intervenant se sert du mot inconnu, mais en le remplaçant par il », elle », on » ou par c’était ». Par exemple, Ă  une personne qui se plaint en disant Ces catawalks me font mal ! », l’intervenant peut rĂ©pondre OĂč vous font-ils mal ? », le pronom ils » remplaçant le mot inconnu catawalks ». À une autre personne qui dit J’ai chuftĂ© avec les mounnets », on pourra rĂ©pondre Et c’était agrĂ©able ? Que vous a-t-on dit ? » Les mots ils », elles », on », c’était » etc. sont utilisĂ©s pour remplacer les mots inconnus du dictionnaire. De cette façon, la communication est maintenue et la personne atteinte se sent comprise. Elle a l’impression d’ĂȘtre une interlocutrice valable dans la discussion. Mais cette technique n’est utilisable qu’à condition de l’avoir bien comprise il ne s’agit en aucun cas de se moquer de la personne. Il s’agit au contraire d’une Ă©coute particuliĂšrement subtile essayer de comprendre de quoi on nous parle alors que les mots sont perdus ; essayer plus encore de sentir quelles sont les Ă©motions de l’autre alors mĂȘme que nous ne savons pas ce qui l’émeut. Il s’agit en somme du vĂ©ritable accompagnement accompagner l’autre c’est accepter d’aller avec lui alors qu’on ne sait pas oĂč il va. Observer, puis copier les mouvements et les Ă©motions de l’intĂ©ressĂ© Naomi Feil appelle cela la technique du miroir ». Cette technique permet Ă  l’intervenant d’entrer dans le monde Ă©motionnel de la personne. Elle sert Ă  tisser un lien de confiance avec une personne atteinte qui ne s’exprime plus verbalement, afin d’éviter qu’elle se replie totalement sur elle-mĂȘme. Pour ce faire, l’intervenant observe soigneusement l’attitude, les yeux, les expressions du visage, la lĂšvre infĂ©rieure, l’allure gĂ©nĂ©rale, les mouvements rĂ©pĂ©titifs, etc. de la personne atteinte. L’intervenant cherche ensuite Ă  accorder son attitude, ses gestes et sa respiration Ă  ceux de la personne Ă  valider. La technique du Miroir » effectuĂ©e avec empathie devient un outil prĂ©cieux pour crĂ©er ce climat de confiance indispensable au mieux-ĂȘtre de la personne atteinte. Voici le tĂ©moignage que livre Naomi Feil sur l’utilisation de cette technique Mildred Hopkins, ancienne secrĂ©taire d’avocat, ne s’est jamais mariĂ©e. Elle a travaillĂ© pour le mĂȘme cabinet pendant 45 ans. Aujourd’hui, Ă  86 ans, [...], elle a besoin nĂ©anmoins de rester active. Le travail a toujours Ă©tĂ© son unique source de dignitĂ©. Se voyant en esprit devant sa machine Ă  Ă©crire Underwood, elle retrouve les gestes du passĂ© et remue rapidement les doigts pour achever de taper ce que son patron lui a dictĂ©, avant qu’il ne se rende au tribunal. L’intervenante qui utilise la Validation imite les mouvements de doigts de Mildred. Cette derniĂšre voit les doigts de son imitatrice reproduire le rythme des siens. Elle lĂšve les yeux. Leurs regards se croisent. Elles tapent ensemble. Avec admiration, l’intervenante sourit Ă  Mildred Combien de mots-minute pouvez-vous taper ? », lui demande-t-elle. 92 ! » rĂ©pond Mildred avec fiertĂ©. C’est le premier mot qu’elle prononçait depuis son entrĂ©e Ă  la maison de santĂ©, 6 mois plus tĂŽt ». En copiant ses mouvements, l’intervenante qui s’est servi de la Validation a créé une complicitĂ© avec elle. RassurĂ©e sur le plan relationnel, Mildred commença Ă  s’extĂ©rioriser. Son Ă©locution revint peu Ă  peu et elle sembla retrouver de l’intĂ©rĂȘt pour ce qui se passait autour d’elle. Associer le comportement avec les besoins insatisfaits ou les besoins exprimĂ©s Il s’agit ici de reconnaĂźtre que le comportement de la personne atteinte exprime, d’une façon ou d’une autre, l’un des trois besoins fondamentaux de l’ĂȘtre humain ĂȘtre aimĂ©, ĂȘtre utile et le besoin d’exprimer les fortes Ă©motions. Tout le problĂšme est donc de savoir quels sont les besoins exprimĂ©s par tel ou tel comportement ; on peut y parvenir en observant le malade, et lĂ  encore en Ă©coutant le sentiment qui s’exprime pendant le comportement. ConsidĂ©rons par exemple un patient qui passe ses journĂ©es Ă  frotter les meubles a une raison de le faire. Le soignant peut rĂ©agir de trois maniĂšres 1. Il peut essayer d’empĂȘcher le malade de frotter au motif que c’est sale. 2. Il peut laisser le malade Ă  son comportement sans chercher Ă  l’interprĂ©ter. 3. Il peut enfin essayer de percevoir l’émotion ou le besoin associĂ© au comportement. Dans ces dernier cas, s’il parvient Ă  comprendre ce qui se passe, il va pouvoir aider le patient en lui parlant de ce qui se passe. Utiliser la musique La musique fait appel aux Ă©motions. Et les Ă©motions sont ancrĂ©es bien loin dans la mĂ©moire affective de la personne. Ce qui fait que souvent, les gens qui ne parlent plus sont quand mĂȘme capables de chanter une chanson de leur enfance. AprĂšs avoir entendu puis chantĂ© une mĂ©lodie familiĂšre, des personnes atteintes qui ne parlaient plus du tout sont parfois capables de dire quelques mots ; en toute hypothĂšse elles sont le plus souvent trĂšs attirĂ©es par la musique, le rythme, et cela les calme le plus souvent trĂšs bien. EN GUISE DE CONCLUSION Il est facile de voir que la Validation n’est pas une mĂ©thode, mais une succession de techniques, certaines Ă©videntes d’autres moins, certaines originales d’autres moins, et que tout cela ne va pas trĂšs loin. Mais il reste une idĂ©e fondamentale, qui doit ĂȘtre connue et mise en pratique il importe de reconnaĂźtre au dĂ©ment le droit Ă  la parole, et surtout le droit Ă  sa parole. Ce qu’il nous dit n’est pas conforme aux rĂšgles habituelles de la logique et de la communication ; cela ne signifie en rien qu’il n’a pas quelque chose Ă  nous dire. Lorsqu’un patient est empĂȘchĂ© de parler, par une aphasie ou une trachĂ©otomie, nous savons dire que notre devoir est d’essayer par-dessus tout de le comprendre ce n’est pas parce qu’il n’a plus accĂšs au langage qu’il n’a rien Ă  dire. De la mĂȘme maniĂšre le dĂ©ment n’a plus accĂšs Ă  la parole ; pour autant ce serait une erreur que de croire qu’il ne pense pas. La mission du soignant est alors de comprendre le dĂ©ment autant qu’il est possible ; pour cela la premiĂšre chose Ă  faire est de lui faire confiance il faut avoir confiance dans son aptitude Ă  penser, Ă  communiquer, mĂȘme si c’est un peu difficile. L’objectif de la Validation n’est rien d’autre.

les 14 techniques de validation naomi feil