Naomifeil and vicki de klerk rubin the validation breakthrough simple techniques for municating with people with alzheimer s and other dementias third edition health professions press baltimore maryland 2012 304 pp pbk 34 95 isbn 13 978 1 932529 93 7 volume 33 issue 7 fiona kelly.
Reconnueet utilisĂ©e dans le monde entier, la Validation de Naomi Feil est une mĂ©thode dâaccompagnement pour les personnes ĂągĂ©es atteintes de la maladie dâAlzheimer ou de maladies apparentĂ©es. Ce livre est destinĂ© Ă tous ceux qui prennent soin des grands vieillards dĂ©sorientĂ©s et les accompagnent au quotidien.
2899. TĂ©lĂ©charger. Validation Ein Weg zum VerstĂ€ndnis verwirrter alter Menschen - ebook (ePub) Naomi Feil (Auteur), Vicki de Klerk-Rubin (Auteur) Naomi Feil hat fĂŒr den Umgang mit desorientierten alten Menschen die
vousĂȘtes maintenant Ă la maison de retraite de montefiore ". elle rĂ©pond : " je le sais, ne soyez pas idiote. c'est pour ça que je dois partir tout de suite " je dois rentrer pour nourrir mes enfants ! " je lui dis alors " madame kessler, vous ne pouvez rentrer chez vous. vos enfants ne sont pas lĂ . vous ĂȘtes maintenant Ă la maison de retraite de montefiore ". elle rĂ©pond : " je le
LesĂ©tapes de la Validation de Naomi Feil; Le trĂ©pied de la Validation: savoir-ĂȘtre, bases thĂ©oriques et savoir-faire ; Les techniques de base pour la communication verbale et non verbale ; MĂ©thodologie. Apports thĂ©oriques; Exercice pratique par des jeux de rĂŽles ou par le biais de sĂ©quences vidĂ©os; Discussion et Ă©change dâexpĂ©riences; Public cible. Tout·e professionnel·e
PRADELFeil/De Klerk-Rubin: Validation, mode d'emploi - la methode en pratique. des techniques simples pour communiquer avec les Achetez maintenant en ligne sur stock Ă la boutique Ă Luxembourg Acheter en ligne
Ily a quelques jours jâai reçu une tutrice professionnelle qui mâa parlĂ© de la mĂ©thode de Naomi Feil. J'y ai trouvĂ© des pistes de travail intĂ©ressantes et lâĂ©pisode de lâEHPAD mâest revenu. Jâen
etformatrice de formateurs Ă la pratique de la validationâą de n. feil, directrice de lâinstitut de formations m & r. 2. gĂriatre et psycho-gĂriatre, coordonnateur et responsable mĂdical du pĂle
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1La Validation ne constitue plus en elle-mĂȘme une nouveautĂ©, dans la mesure oĂč sa conception remonte Ă 1963 et son introduction en Europe Ă 1988. Pourtant, profondĂ©ment novatrice dans son intention, elle sâinscrit Ă contre courant des dogmes en vigueur, et du pronostic implacable et aliĂ©nant, alors associĂ© Ă la maladie dâAlzheimer. 2Elle postule quâil est possible dâentretenir une relation de qualitĂ© avec les personnes ĂągĂ©es dites dĂ©mentes et entreprend de dĂ©velopper une pratique, qui manifeste le droit imprescriptible de tout ĂȘtre humain au respect de sa dignitĂ©, de son intĂ©gritĂ© et de sa libertĂ© dâexpression. Attentive au parcours de vie, elle puise dans les thĂ©ories du dĂ©veloppement, dans les travaux dâAbraham Maslow et dans la psychanalyse, matiĂšre Ă prĂ©supposer un sens aux troubles psycho comportementaux des grands vieillards. Afin de nourrir des Ă©changes fonctionnels, elle sâemploie Ă identifier et Ă rĂ©ajuster en fonction des rĂ©sultats observĂ©s, les modes de communication opĂ©rant durant les phases successives de la maladie. ConsidĂ©rant la place essentielle de lâaffectivitĂ© dans la psychĂ© des personnes ĂągĂ©es dĂ©sorientĂ©es, elle sâinspire de lâattitude empathique prĂŽnĂ©e par Carl Rogers pour instaurer une Ă©coute et maintenir une distance juste, en soutien de la dynamique propre Ă chaque individu. 3Aujourdâhui, la Validation trouve des applications qui viennent enrichir la pratique des professionnels mis en Ă©chec et parfois dĂ©sabusĂ©s, et celle des proches souvent accablĂ©s par un fardeau dĂ©sespĂ©rant. Selon nos observations, elles suscitent des prises en charge » renouvelĂ©es par lâexpĂ©rience essentielle dâune prĂ©sence authentique Ă lâAutre ; maniĂšre dâ ouvrir la porte comme un voyageur installĂ© pour un temps accueille un autre voyageur, prenant soin de son bien ĂȘtre, sans lui imposer la discipline de son chemin ni les visions de son propre voyage » [1]. Elle peut ainsi contribuer Ă rĂ©vĂ©ler les ressources latentes, une crĂ©ativitĂ© partagĂ©e, et Ă rĂ© susciter la motivation de chacun des acteurs, en les mobilisant sur des objectifs rĂ©alistes dans lâexercice quotidien de leurs fonctions. ORIGINES ET PRĂSUPPOSĂS FONDATEURS4Naomi Feil est nĂ©e en Allemagne en 1932. ImmigrĂ©e aux Ătats-Unis en 1936, elle a fait ses Ă©tudes de psychologie Ă New York, obtenu une MaĂźtrise et un certificat de travail en groupes. Depuis 45 ans, elle sâemploie Ă trouver des moyens de mieux accompagner les grands vieillards qualifiĂ©s de dĂ©ments sĂ©niles. Elle choisit de les aborder en tant que sujets, dont le vieillissement restreint le potentiel physique, sensoriel et psychique, les exposant Ă ĂȘtre mal heureusement orientĂ©s, ou dĂ©sorientĂ©s privĂ©s dâorientation, plutĂŽt que les rĂ©duire Ă un statut de malade ou de dĂ©ment. 5Elle tisse des liens entre thĂ©ories, observations et mise en Ćuvre pragmatique de la communication. Chemin faisant, elle optimise ainsi, et structure, une pratique destinĂ©e Ă maintenir des Ă©changes significatifs avec ces personnes disqualifiĂ©es et marginalisĂ©es. Elle nomme dâabord son approche Fantasy Therapy », thĂ©rapie de ou par lâimaginaire puis, Validation Therapy ». Therapy » au sens de prendre soin et Validation » pour Ă©voquer la reconnaissance dâune spontanĂ©itĂ© crĂ©ative et pertinente, mobilisĂ©e par des affects et se dĂ©clinant en comportements qui, par delĂ lâaltĂ©ritĂ©, en appellent Ă la reconnaissance inconditionnelle de lĂȘtre humain. 6ReconnaĂźtre valeur et pertinence Ă ceux quâon sâaccordait trop souvent Ă considĂ©rer comme privĂ©s de raison, voire comme fous, constituait en soi une innovation qui nâallait pas manquer dâĂ©branler des prĂ©jugĂ©s bien Ă©tablis. CHOIX DâUNE VISION POSITIVE PLUTĂT QUE DĂFICITAIRE PRĂSUPPOSĂ ONTOLOGIQUE LA MALADIE NâALTĂRE PAS LA NATURE ESSENTIELLE DE LâĂTRE HUMAIN7En dĂ©pit des altĂ©rations engendrĂ©es par la maladie, la personne conserve son statut et lâidentitĂ© profonde quâelle sâest forgĂ©e durant son parcours de vie. 8Cela implique le respect de son intĂ©gritĂ©, passe par lâusage des codes sociaux tels que lâemploi du nom, le vouvoiement, la poignĂ©e de main, et requiert de traiter la personne atteinte avec Ă©gard, en tenant compte de sa rĂ©alitĂ© subjective, de son rythme, de ses affects parfois dĂ©calĂ©s » et de ses demandes. Dans cette optique bisous » et autres gestes familiers doivent rester lâapanage des proches, afin de prĂ©munir les protagonistes envers jeux de projections et fausses reconnaissances. 9Alors, au lieu de cantonner dans sa chambre â pour dâincessants appels au secours » â cette vieille dame mise au fauteuil roulant dans le but de lui prĂ©server une hypothĂ©tique dignitĂ© posturale, on pourrait rĂ©pondre Ă un probable besoin de prĂ©sence et entendre » sa propre perception de sa dignitĂ© et de son confort, pour aboutir, par exemple, Ă lui proposer de lâinstaller confortablement dans son lit en programmant visites, réévaluations et rĂ©ajustements rĂ©guliers. PRĂSUPPOSĂ ANTHROPOLOGIQUE LE VIEILLARD DĂSORIENTĂ DEMEURE ENGAGĂ DANS UN PROCESSUS DE DĂVELOPPEMENT, JUSQUâAU TERME DE SON EXISTENCE10LâidĂ©e quâune personne Ă©volue sa vie durant est inspirĂ©e, au dĂ©part, de Jean Piaget ; et lâidĂ©e quâelle aspire Ă terminer ses jours avec le sentiment du devoir accompli â en paix avec elle-mĂȘme et autrui â est empruntĂ©e Ă Erik Erikson [2]. Selon ce dernier, ceux qui, leur vie durant, auraient su affronter avec succĂšs leurs Ă©preuves, pourraient compter atteindre une forme dâaccomplissement et de sĂ©rĂ©nitĂ©, les autres Ă©tant vouĂ©s au dĂ©sespoir, faute dâun bilan acceptable. 11Or, les personnes ĂągĂ©es dĂ©mentes » ont aussi Ă©tĂ© jeunes ; elles ont parcouru avec plus ou moins de bonheur leurs diffĂ©rentes Ă©tapes de vie, jalonnĂ©es de crises et marquĂ©es par les Ă©vĂ©nements singuliers de leur histoire personnelle, familiale et sociale. 12ConsidĂ©rant quâelles gardent une personnalitĂ© pĂ©renne, conservent des capacitĂ©s et des affects parfois refoulĂ©s et que, elles aussi, aspirent Ă une lĂ©gitime paix intĂ©rieure, Naomi Feil avance une hypothĂšse audacieuse au prix dâune altĂ©ration de leur rapport avec ce quâil est convenu dâappeler la rĂ©alitĂ©, une forme de rĂ©paration resterait accessible Ă ceux quâencombrent dâanciens vestiges Ă©motionnels et qui parfois opĂšrent sous nos regards incrĂ©dules une forme de retour, voire de rĂ©interprĂ©tation, de certains Ă©pisodes marquants de leur vie. 13Elle ajoute donc aux Ă©tapes de vie dĂ©crites par Erik Erikson une Ă©tape facultative, quâelle appelle Ă©tape de la RĂ©solution », apanage du trĂšs grand Ăąge. Sorte de derniĂšre chance de mettre sa vie en ordre avant de la quitter que sâoctroierait le vieillard en proie au dĂ©sespoir. Boris Cyrulnik [2] Ă©voque une notion similaire lorsquâil Ă©crit que Le rĂ©examen de la vie a Ă©tĂ© proposĂ© Ă titre psychothĂ©rapeutique pour les ĂągĂ©s. Il sâagit dâun processus mental qui, quelle que soit la culture, se manifeste naturellement par le retour progressif Ă la conscience des expĂ©riences passĂ©es, notamment la rĂ©surgence des conflits non rĂ©solus ». 14A dĂ©faut de se sentir accompagnĂ©e, acceptĂ©e ou pour le moins entendue la personne, engagĂ©e dans cette Ă©tape de RĂ©solution », est susceptible de rĂ©gresser de maniĂšre variable, selon quatre phases correspondant Ă des profils psycho comportementaux distincts, dĂ©crits par Naomi Feil la mal-orientation oĂč la personne demeure orientĂ©e dans le temps et lâespace, utilise correctement le langage, mais aurait tendance Ă nier ses pertes, au prix dâinterprĂ©tations plus ou moins fantaisistes, par exemple mon lit est tout mouillĂ©, car il y a des fuites au plafond » ; la confusion temporelle oĂč la personne prĂ©senterait une dĂ©sorientation temporo-spatiale et interpersonnelle, mais utiliserait encore correctement le langage parlĂ© ; la phase des mouvements rĂ©pĂ©titifs oĂč elle remplacerait le langage parlĂ© par des mouvements ou des sons ; et enfin la phase dâĂ©tat vĂ©gĂ©tatif, oĂč la personne garderait le plus souvent les yeux fermĂ©s et bougerait Ă peine, mais, malgrĂ© ce repli sur elle-mĂȘme, resterait sensible aux sons, aux odeurs, au toucher. PRĂSUPPOSĂ PSYCHOSOCIOLOGIQUE LE RAPPORT AU RĂEL EST PERSONNEL, SUBJECTIF ET SOUMIS Ă LâAFFECTIVITĂ15La rĂ©alitĂ© » est une construction dĂ©pendant de nos perceptions sensorielles, sous influence du langage, des interactions, de la culture et des conceptions du monde que nous partageons. 16La notion selon laquelle les Ă©motions voyagent dans le temps » â une Ă©motion actuelle pouvant rĂ©activer la mĂ©moire dâĂ©vĂ©nements passĂ©s â est hĂ©ritĂ©e du champ psychanalytique. Les Ă©motions mobilisent la pensĂ©e et la conduisent Ă revisiter les Ă©pisodes significatifs auxquels elles sont attachĂ©es ; si bien que les exprimer permet parfois de soulager des tensions anciennes [3]. 17La dĂ©sorientation des vieillards peut ainsi ĂȘtre envisagĂ©e, non comme la simple manifestation dâune dĂ©ficience [4] mais, comme une capacitĂ© Ă rĂ©actualiser des sĂ©quences passĂ©es avec lesquelles â elles et leur entourage â gardent des liens intemporels de nature affective. PRĂSUPPOSĂ PSYCHOCOMPORTEMENTAL TOUT COMPORTEMENT A UNE FONCTION, MĂME SI NOUS NE SOMMES PAS EN MESURE DE LUI ATTRIBUER UN SENS18Au cours du dĂ©veloppement de lâhomme le mouvement prĂ©cĂšde le langage [8] ; il manifesterait une intention, serait lâexpression dâun dĂ©sir et le porteur dâun sens implicite. Tout comportement, tout geste prendrait donc valeur de message potentiel et aurait vocation Ă ĂȘtre un vecteur de communication. 19ConsidĂ©rant que le comportement dâune personne ĂągĂ©e, mal ou dĂ©sorientĂ©e, ne peut ĂȘtre dĂ©terminĂ© par les seules lĂ©sions cĂ©rĂ©brales, Naomi Feil propose dâĂ©viter de la dĂ©tourner du projet qui lâanime, pour lui permettre de sâexprimer et dâen reconnaĂźtre, dâen valider », la lĂ©gitimitĂ©. PROJET DE COMMUNIQUER POUR ENTRETENIR UNE DYNAMIQUE DE LA RELATION 20Un tel projet procĂšde dâune intention modeste et dâinitiatives concrĂštes, suivies dâune observation attentive des effets induits et dâautant de rĂ©ajustements que nĂ©cessaires. Dans lâesprit du dĂ©butant il y a de nombreuses possibilitĂ©s, dans lâesprit du spĂ©cialiste il y en a peu » [9]. ON NE PEUT PAS NE PAS COMMUNIQUER » AXIOME ISSU DE LA LOGIQUE DE LA COMMUNICATION [10] 21Dans la mesure oĂč la parole fonde notre humanitĂ©, il convient de considĂ©rer la parole disqualifiĂ©e du sujet dĂ©clarĂ© dĂ©ment » en tenant compte de ses capacitĂ©s de communication sur un mode Ă©largi au non verbal, câest-Ă -dire prenant en compte sa posture, sa gestuelle, ses mimiques, mais aussi ses conduites et leurs dimensions symboliques, afin que son statut soit restaurĂ© et entretenu dans lâĂ©change. OBSTACLES COUTUMIERS22Hormis les rĂ©sistances liĂ©es Ă la peur dâune impensable » communication avec celui encore trop perçu comme tout autre, les entraves communes sont les interprĂ©tations Vous dites ça, parce que vous ĂȘtes fĂąchĂ© » ; les gĂ©nĂ©ralisations Vous voulez toujours avoir raison ! », et toutes formes de rationalisations, affirmations, jugements et conseils. Il existe aussi un autre excellent moyen de rompre la relation et de casser » la confiance avec le vieillard Alzheimer câest de ne pas lui prĂȘter attention et de ne tenir aucun compte de ses rĂ©actions, verbales et non verbales. INITIER UNE COMMUNICATION FONCTIONNELLE23Parmi une vingtaine dâoutils usuels proposĂ©s par Naomi Feil, la reformulation utilisĂ©e avec mesure et discernement confirme Ă lâinterlocuteur quâil a Ă©tĂ© entendu. Faisant Ă©cho aux mots, au ton, Ă la gestuelle, elle contribue Ă engager une prise de contact, une alliance, pour initier une relation propice Ă lâaccompagnement. On invite ainsi le vieillard dĂ©sorientĂ© Ă sâexprimer selon sa vision du monde, en sâaccordant Ă lui pour cheminer de conserve. 24Boris Cyrulnik [11] rappelle que Le cheminement le plus sain et le moins coĂ»teux est constituĂ© par la narrativitĂ©. La compĂ©tence au rĂ©cit de soi est nĂ©cessaire pour se faire une image de sa propre personnalitĂ©. Ce travail provoque un Ă©trange plaisir ». Plus encore la narrativitĂ© permet de se constituer en sujet intime et la narration invite Ă prendre sa place dans le monde humain en partageant son histoire ». ATTITUDE ATTENTIVE Ă MANIFESTER UNE PRĂSENCE OBSERVATION ET REGARD25Observation et quĂȘte du regard sont dĂ©terminantes pour solliciter lâautre Ă entrer en relation et le rejoindre sans sâimposer. Ces deux attitudes contribuent au recueil dâinformations sur son Ă©tat Ă©motionnel et autorisent les ajustements indispensables pour entretenir la relation et pour que lâAutre ait lâopportunitĂ© de se sentir reconnu, validĂ©. Le plus important pour moi, ce qui mâa le plus fondĂ©, ce qui mâa donnĂ© de lâappui, ce nâest pas ce que cet homme mâa donnĂ© Ă croire câest quâil mâa cru » [12]. DISTANCE ET FRONTIĂRES26Nous avons tous besoin de cartes » pour nous orienter, mais nous devons aussi savoir reconsidĂ©rer nos idĂ©es prĂ©conçues pour nous adapter au terrain », au fil des Ă©vĂ©nements. Si cela ne marche pas, nâen restez pas lĂ , faites autre chose » [13]. 27Le rĂ©ajustement de la distance en fonction des rĂ©actions non verbales requiert une attention constante Ă autrui et tĂ©moigne de la valeur quâon lui accorde. Une telle disponibilitĂ© suppose une prĂ©sence authentique et demande une vigilance tendue simultanĂ©ment vers lâautre et vers soi. Celle-ci peut sâexercer avec une pratique du centrage », consistant Ă prendre le temps de se rassembler », de prendre conscience de ce que lâon apporte avec soi, pour se prĂ©parer Ă la rencontre et parvenir Ă diffĂ©rencier son propre Ă©tat Ă©motionnel de celui de lâautre. EMPATHIE28Carl Rogers dĂ©fini lâempathie comme la facultĂ© » que doit dĂ©velopper tout thĂ©rapeute pour se rendre disponible et affranchi de ses prĂ©occupations personnelles, Ă lâinstar dâune caisse de rĂ©sonance ». ConsidĂ©rant le client comme seul dĂ©tenteur de la solution Ă son problĂšme, il prĂ©cise quâil faut veiller Ă nâĂȘtre pas perçu comme une menace. Ces dispositions essentielles Ă la pratique de la Validation demandent flexibilitĂ© et congruence [14] pour accompagner lâexpression des Ă©motions qui se manifestent. 29Lâempathie requiert de lâintervenant la capacitĂ© de faire confiance Ă lâautre, mĂȘme dĂ©ment, afin de cerner son mode de rĂ©solution. Naomi Feil souligne la nĂ©cessitĂ©, pour sây familiariser, de sâentraĂźner et de cadrer le temps. Sans limite de temps, ni conscience de ses propres limites, lâintervenant sâexposerait Ă la confusion et au risque de substituer son vĂ©cu Ă celui de lâautre. 30Certaines pratiques en usage, telles la rĂ©orientation dans la rĂ©alitĂ©, le mensonge thĂ©rapeutique pour enjoliver une rĂ©alitĂ© perçue par lâaidant comme trop douloureuse, ou la diversion pour distraire la personne de ce qui la prĂ©occupe et lâamener Ă penser Ă autre chose, tentent Ă leur maniĂšre de combler lâimmense dĂ©sarroi des aidants face Ă ces personnes dâun âcommerce â parfois difficile, tant elles sont diffĂ©rentes du âcommun des mortelsâ mais qui peuvent se rĂ©vĂ©ler trĂšs attachantes Ă lâusage [15] ». 31Mais, pour sa part, Naomi Feil prĂŽne dâĂ©viter de telles attitudes de patronage » ou de maternage et propose de sâaccorder au rythme du vieillard dĂ©sorientĂ©, de mettre ses pas dans ses pas », pour tenter dâentrer en rĂ©sonance » avec lui. Il sâagit de nâĂȘtre ni devant, ni derriĂšre, mais avec » lui, Ă ses cĂŽtĂ©s, de le rejoindre dans sa rĂ©alitĂ© du moment et de lâexplorer ensemble, sans la remettre en question, afin quâil puisse se sentir en compagnie. 32En rĂ©sumĂ©, cette approche ne tolĂšre ni pieux mensonges, ni diversions charitables, ni rĂ©confort illusoire. Elle exige authenticitĂ© et honnĂȘtetĂ© dans lâexercice dâune responsabilitĂ© consciente de ses propres limites. APPLICATIONS ACTUELLES FORMATIONS INTERDISCIPLINAIRES 33Suscitant un sentiment dâimpuissance propre Ă malmener leur identitĂ© professionnelle, la formation initiale laisse trop souvent les professionnels dĂ©munis face aux vieux Alzheime r », capables Ă la fois de solliciter et de rejeter, de flatter et de harceler. Faute dâune relation authentique, comment ne pas sâĂ©puiser Ă faire pour » ou sur », Ă faire » marcher, faire » manger, faire » la toilette ou, pire, Ă faire Mme Untel » !!... 34Naomi Feil rappelle quâun soignant a besoin dâĂ©changes pour pouvoir sâallĂ©ger », se sentir entendu et parvenir Ă assumer sereinement son exercice professionnel. Avec ses collaborateurs amĂ©ricains et europĂ©ens, elle a donc Ă©laborĂ© des formations destinĂ©es Ă transmettre le fruit de lâexpĂ©rience acquise. Il sâagit dâaboutir Ă des applications, qui contribuent Ă enrichir la pratique des professionnels en gĂ©rontologie et Ă entretenir leur motivation Ă prendre soin, en perpĂ©tuant la relation dâaide » â qui donne sens au rĂŽle de soignant â cette part confisquĂ©e par lâĂ©tiquette dĂ©mentielle. ConsidĂ©rant la relation soignant-soignĂ© comme le prĂ©alable indispensable Ă toute dĂ©marche de soin, la formation sâemploie Ă dĂ©velopper les capacitĂ©s des professionnels Ă utiliser des modes de communication fonctionnels pour entretenir le lien avec les vieux dits dĂ©ments, tout en veillant Ă leur propre intĂ©gritĂ© et au respect de lâĂ©cologie relationnelle au sein des institutions. Cela requiert un cadre rigoureux, garant de la sĂ©curitĂ© de chacun, basĂ© sur la confidentialitĂ©, le non jugement, le droit de dire, de savoir et ne pas savoir, lâinvitation Ă une crĂ©ativitĂ© partagĂ©e. A la lumiĂšre des thĂ©ories qui sous-tendent la pratique de la Validation, il est question de dĂ©couvrir des maniĂšres diffĂ©rentes et plus ouvertes de voir, dâĂȘtre et de faire, dans lâexploration de cette singuliĂšre relation soignant soignĂ©. 35Le projet est de proposer un soin acceptable dont lâexĂ©cution engage une coopĂ©ration et un partenariat avec la personne au lieu dâun soin subit. Il intĂšgrera certes des actes techniques et dâaide Ă la vie quotidienne, mais dans un Ă©change fondĂ© sur la prĂ©sence, ouvert Ă lâimaginaire, Ă la transmission et en lien avec lâensemble des acteurs engagĂ©s dans lâaccompagnement de la personne ĂągĂ©e dĂ©sorientĂ©e et de ses proches. TĂMOIGNAGES DE PROFESSIONNELS 36 Cette pratique me permet de porter sur le vieillard un autre regard, et de remettre du sens dans le travail que je fais. » Patricia, infirmiĂšre Je retrouve ma motivation de dĂ©part Ă ĂȘtre soignant. » StĂ©phane, aide soignant La formation mâa permis de reprendre confiance en moi, de ne plus apprĂ©hender de devoir mâoccuper dâune personne Alzheimer. Maintenant jâai envie de la rencontrer... » Sybille, aide soignante A nous soignants, accompagnants, il est demandĂ© de les rejoindre, en quelque sorte dâentrer dans leur univers le temps dâun soin [...] dâentrer en communication avec eux, mĂȘme si nous ne connaissons par leur histoire. Cette formation nous aide Ă maintenir la communication avec eux, Ă les reconnaĂźtre comme personnes, Ă valoriser leurs propos et leur permettre de cheminer par eux-mĂȘmes dans leur histoire, en Ă©tant pleinement reconnus [...] cela redonne sens et humanitĂ© Ă lâĂȘtre Ă qui nous nous adressons, [...] Mais câest nous qui sommes gagnants de mieux comprendre ce quâil vit, dâaccompagner [...] de rester prĂ©venants, attentifs Ă ses gestes, Ă son visage, pour tenter de lire ce qui lâhabite, et dâagir au mieux Ă ses cĂŽtĂ©s. » Annie, aide soignante Cette approche est facilement applicable [...] basĂ©e sur du vĂ©cu, elle est humaine et fondamentale pour notre travail et se situe dans le monde rĂ©el du soignant. » Carmen, aide soignante EFFETS CONSTATĂS EN INSTITUTION37Dans le cadre de la certification du CHU de Reims, le pĂŽle EHPAD a consacrĂ© une dĂ©marche dâĂ©valuation des pratiques professionnelles EPP, Ă la prise en charge non mĂ©dicamenteuse des personnes ĂągĂ©es atteintes de maladie dâAlzheimer ou de troubles apparentĂ©s. DĂ©butĂ©e en 2007 au sein dâune unitĂ© de 60 lits, elle inclut la formation de lâĂ©quipe Ă la pratique des Bases de la Validation, sur le principe dâun volontariat. 38En 18 mois, dans cette unitĂ©, lâusage des neuroleptiques sâest fortement rĂ©duit et les prescriptions au long cours ont disparu [16]. Les soignants dĂ©clarent se sentir moins dĂ©munis face aux comportements agressifs, plus capables de comprendre demandes et besoins des personnes atteintes, plus satisfaits des relations avec les rĂ©sidents et entre collĂšgues. Ils se disent fĂ©dĂ©rĂ©s par un projet commun et dĂ©positaires de compĂ©tences que les services voisins viennent solliciter. 39Lâencadrement confirme le regain de motivation, associĂ© Ă une chute des deux tiers de lâabsentĂ©isme et une amĂ©lioration de lâimage de lâunitĂ© auprĂšs des proches, attestĂ©e par une diminution des plaintes de familles qui se disent mieux accueillies. Lâensemble du pĂŽle enregistre une progression du nombre de postulants pour travailler dans les petites unitĂ©s de vie, lâaccueil de jour et lâaccueil temporaire pour patients Alzheimer. 40DĂ©jĂ , la crĂ©ation dâune premiĂšre unitĂ© de vie Alzheimer en 2006 avait renforcĂ© les Ă©changes avec les personnes atteintes, la participation des proches et suscitĂ© des rencontres, jusquâĂ inspirer la crĂ©ation dâun spectacle 007A, voyage au pays de lâoubli » ; un conte » qui porte leurs paroles vers le public, Ă travers lâhistoire imaginĂ©e de MĂ©mĂ© Nui », la gardienne des rĂȘves, qui rĂ©introduit la part du mystĂšre, dans ce quâil advient de nous⊠Comme une invitation Ă sâaffranchir dâune position de victime, pour redevenir acteur de quelques contes Ă rĂ©gler », ou dâune destinĂ©e Ă crĂ©er ensemble. FORMATION DES AIDANTS NATURELS ET BĂNĂVOLES 41InitiĂ©e Ă la demande des aidants en quĂȘte de moyens concrets pour maintenir des Ă©changes significatifs, ces actions ont eu pour simple objectif de dĂ©velopper leur capacitĂ© Ă prendre soin dâeux mĂȘme, Ă prendre du recul, Ă se repositionner et Ă communiquer autrement [17] mais avec authenticitĂ©, plutĂŽt que de sâenfermer dans une relation de co-dĂ©pendance. En complĂ©ment des groupes de parole, ce travail semble contribuer Ă aider lâaidant Ă dire Ă lâautre sa rĂ©alitĂ© propre et ses limites, Ă surmonter le sentiment de culpabilitĂ© et Ă engager un processus de deuil, non de lâautre, mais de ce dont on avait rĂȘvĂ© ensemble, pour pouvoir peut-ĂȘtre envisager un avenir nouveau et diffĂ©rent. 42 Jâai pris la dĂ©cision la plus difficile de ma vie dire Ă Ginette que je ne viendrai pas la rechercher, mais que je continuerai Ă mâoccuper dâelle. Sa rĂ©ponse mâa Ă©mu aux larmes â Je ne mâĂ©tais pas aperçue que tu Ă©tais si fatigué⊠alors, jâai la maladie dâAlzheimer. Heureusement que tu es lĂ â. Je devenais impatient avec elle, mais aujourdâhui, je vais mieux. Elle est contente de me voir et nous partageons encore de bons moments ». Jean, Ă©poux, 2008. COMMENTAIRES INTENTION43De lâocĂ©an de la psychologie, de la mĂ©decine et de la philosophie, nous Ă©mergeons sur la terre plus ferme de lâintervention, oĂč il nây a ni bon, ni mauvais diagnostic, pas de thĂ©orie juste ou fausse, mais des donnĂ©es relatives Ă ce qui agit ou est utile. 44Sur la base dâune vision humaniste inspirĂ©e des thĂ©ories du dĂ©veloppement, Naomi Feil, propose une approche profondĂ©ment gĂ©rontologique des grands vieillards dits dĂ©ments, mettant en valeur leurs capacitĂ©s et leurs aptitudes naturelles, pour leur offrir un accompagnement plus digne. Adopter cette approche, câest accepter de dĂ©couvrir en permanence des choses nouvelles et apprendre dâeux comment travailler avec eux. 45Nous nâavons pas dĂ©couvert de formule qui cerne la diversitĂ© des ĂȘtres humains, et restons bien conscients de ne pas possĂ©der la rĂ©ponse » Ă toutes les situations. Comme J. Haley [18], nous pensons quâil vaut mieux considĂ©rer les gens comme normaux, car lorsquâon les traite comme des gens normaux ils tendent Ă agir plus normalement. Alors que leur mettre une Ă©tiquette implique que lâon participe Ă la crĂ©ation dâun problĂšme dâune maniĂšre telle que toute Ă©volution est rendue difficile ». Nous nous intĂ©ressons donc aux aspects qui semblent propices Ă favoriser des changements positifs, modestes mais susceptibles dâinduire des effets plus vastes et inattendus dans divers domaines de la vie personnelle ou socio familiale. 46GuĂ©rir une maladie dâAlzheimer dĂ©passe nos compĂ©tences. Mais, communiquer sur un mode verbal et non verbal, accompagner lâexpression des affects et tenir compte de la subjectivitĂ© de la rĂ©alitĂ©, reconnaĂźtre Ă autrui valeur et dignitĂ© et soutenir ses efforts pour lĂ©gitimer son existence Ă ses propres yeux et Ă ceux de son entourage, constituent a priori des objectifs rĂ©alistes et valorisant pour des soignants dĂ©terminĂ©s Ă entretenir une relation vraie. Nous croyons que cette dĂ©marche peut contribuer Ă aider certaines personnes Ă conserver, voire Ă retrouver, chaque matin le goĂ»t de vivre un jour de plus. 47Forte de lâhĂ©ritage des anciens, Naomi Feil apporte une pierre Ă lâĂ©difice commun et sâemploie dĂ©sormais Ă transmettre cette envie de perpĂ©tuer la pratique dâune relation dâaide en continuel renouvellement. 48Quant aux aspects innovants de sa mĂ©thode, ils se matĂ©rialisent dĂ©sormais surtout dans lâenrichissement humain et professionnel qui dĂ©coule de ses applications. RĂSISTANCES ET MISES EN GARDE 49En affrontant les prĂ©jugĂ©s la Validation heurte des rĂ©sistances, suscite des inquiĂ©tudes, gĂ©nĂšre des maladresses, un manque de naturel, parfois des interprĂ©tations abusives par exemple, Ăa fait pleurer », On est indiscret », On les force Ă parler ». Parmi les objections Ăa prend du temps » revient assez frĂ©quemment dans la bouche des professionnels qui dissocient le temps de la relation, de celui du soin, alors que ce dernier se trouve souvent facilitĂ©, avec une moindre frĂ©quence des troubles du comportement, lorsque les deux sont conjuguĂ©s. Ăa demande de lâĂ©nergie et de lâattention » met par contre en relief la nĂ©cessitĂ© dâacquĂ©rir de lâaisance par lâapprentissage dâune pratique personnelle. 50La confrontation vĂ©ritable au vieillard mal ou dĂ©sorientĂ© » peut cependant conduire Ă des remises en question inconfortables tant sur le plan professionnel que personnel, et nous renvoyer Ă notre propre finitude ». Dâailleurs, certaines hypothĂšses retenues par Naomi Feil concernant la psychĂ©, la place et le rĂŽle de la conscience, le processus de dĂ©veloppement, les capacitĂ©s des patients... semblent contraires Ă celles que partagent beaucoup de thĂ©rapies contemporaines. 51Enfin, il convient de savoir quâaucune pratique nâest Ă lâabri dâun mĂ©susage susceptible dâen pervertir la mise en application. On peut ainsi rencontrer, sous prĂ©texte de valider ce que dit la personne, des interprĂ©tations abusives Câest elle qui rĂ©clame les bisous, elle en a besoin, elle aime ça ». Il y a lĂ confusion entre une demande et le besoin de se sentir aimĂ©e ou simplement en sĂ©curitĂ©. MĂ©susage aussi que des reformulations sans rĂ©elle empathie, Ă lâinstar dâun perroquet ; lâapplication sans Ăąme dâoutils de communication telle une recette stĂ©rĂ©otypĂ©e ; des dĂ©rives vers des analyses sauvages, destinĂ©es Ă satisfaire quelque irrĂ©pressible besoin de comprendre, lĂ oĂč il suffit de se contenter dâaccueillir. 52Une dĂ©ontologie et un fort sens Ă©thique se trouvent donc requis. Sans oublier que tout trouble psycho comportemental â pour ne pas risquer de mĂ©connaĂźtre des Ă©tats confusionnels ou dâauthentiques troubles psychiatriques â nĂ©cessite une dĂ©marche clinique prĂ©alable, afin que soit Ă©tabli un diagnostic Ă©tiologique et assurĂ© le traitement dâune Ă©ventuelle cause curable. INDICATIONS ET LIMITES53La Validation convient donc aux personnes dont la pensĂ©e logique est altĂ©rĂ©e, aux alentours de 75 ans, en Ăąge dâentreprendre le bilan dâune vie normale » et supposĂ©es, pour diverses raisons, nâavoir pas sĂ» faire face Ă certaines Ă©preuves traversĂ©es durant leur existence. Il sâagit de personnes qui, au terme dâune vie plus ou moins satisfaisante, se portaient bien jusquâau moment oĂč elles ont opĂ©rĂ© un repli sur elles-mĂȘmes, dĂ©passĂ©es par une accumulation de pertes. 54Elle nâa pas Ă©tĂ© conçue pour des handicapĂ©s mentaux, ni des gens orientĂ©s souffrant dâaffections psychiatriques, ou organiques, tels quâun accident vasculaire cĂ©rĂ©bral, ni pour ceux qui ne sont pas encore de grands vieillards. 55Toutefois, la plupart des principes de la Validation â lâempathie, une attitude respectueuse, une connaissance de la biographie du sujet, la comprĂ©hension de ses motivations et lâusage des outils de communication â pourront sâappliquer avec profit [19] dans nombre de structures pour personnes ĂągĂ©es. RECHERCHES ET PERSPECTIVES DE DĂVELOPPEMENT56Lâattention est ici centrĂ©e sur ce qui est rĂ©alisable et susceptible dâĂ©voluer, plutĂŽt que sur ce qui est inaccessible et ne peut pas ĂȘtre modifiĂ©, un petit changement Ă©tant suffisant pour engager un processus. 57Il convient de rester bien conscients de plusieurs faits ce sont des patients animĂ©s par une intention dĂ©terminante, et il nây a pas une façon juste » de voir les choses. Des points de vue diffĂ©rents peuvent ĂȘtre tout aussi valables. 58Les observations expĂ©rimentales demandent Ă ĂȘtre confirmĂ©es par des travaux de recherche, pour objectiver les effets bĂ©nĂ©fiques et lâimpact sur des paramĂštres aussi divers que la durĂ©e du temps de communication quotidien, la consommation des psychotropes, la frĂ©quence et lâintensitĂ© des troubles du comportement, le fardeau des aidants, la motivation des soignants, lâacquisition de compĂ©tences nouvelles, la valorisation professionnelle, ainsi que lâabsentĂ©isme et la stabilitĂ© des amĂ©liorations Ă travers le temps. 59Nous escomptons des applications personnalisĂ©es, capables de rendre Ă la relation toute sa valeur crĂ©ative et innovante ; câest-Ă - dire de lui permettre de demeurer le lieu dâexpression de notre humanitĂ© mutuellement reconnue et sans cesse rĂ©actualisĂ©e. 60Au-delĂ de lâintĂ©rĂȘt immĂ©diat de ces pratiques pour mobiliser les ressources individuelles dans lâaccompagnement, il serait intĂ©ressant dâestimer leur incidence sur la production collective de sens et la reconnaissance de la fonction du vieillard, par lâentourage et la collectivitĂ©. Sans compter quâune telle dĂ©marche participe de fait dâun effort collectif de solidaritĂ© dans la lutte contre la marginalisation et lâexclusion. 61 LâidĂ©al serait que chaque AlzheimĂ©rien » soit suivi par un tuteur qui sâentoure dâun groupe convivial dâaccompagnement [...], mini-sociĂ©tĂ© qui serait Ă son Ă©coute, attentive et chaleureuse. Ainsi la personne dĂ©boussolĂ©e trouverait-elle un milieu adaptĂ© Ă son Ă©tat singulier, connaĂźtrait-elle un mode de vie qui serait parsemĂ© de moments de bonheur, retrouverait-elle des raisons de vivre » [20]. 62En se fondant sur une vision de prĂ©supposĂ©s et de thĂ©ories, Naomi Feil a acquis une expĂ©rience, Ă©tabli des principes et structurĂ© des techniques, qui dĂ©bouchent sur une pratique en continuel renouvellement. Il semble quâelle aboutisse aujourdâhui Ă des applications mobilisatrices, qui ouvrent pour les soignants, les proches et la collectivitĂ© sociale, la perspective de sâinscrire dans une dynamique relationnelle gratifiante et porteuse de sens. 63Un sens singulier inscrit dans la rencontre de lâAutre, qui sâĂ©labore dans les Ă©changes infimes dâun quotidien en lutte contre la dĂ©shumanisation, voire le rejet et lâexclusion, capable de rĂ©vĂ©ler et de rĂ©orienter nos engagements rĂ©ciproques. 64Un sens collectif, dĂ©diĂ© au respect des libertĂ©s, Ă la solidaritĂ© et Ă la dĂ©fense des droits fondamentaux, sensĂ©s fonder le lien social au sein de nos sociĂ©tĂ©s supposĂ©es Ă©voluĂ©es Un sens enfin, qui viendrait cĂŽtoyer les questions existentielles auxquelles nos vieux se confrontent peut-ĂȘtre, nous prĂ©cĂ©dant tels des explorateurs des confins, pour dĂ©livrer quelque ultime tĂ©moignage Ă celles et ceux qui accepteraient de les entendre ... 65Par ses prĂ©supposĂ©s, sa mise en Ćuvre et ses effets, la Validation pourrait ainsi participer dâune vision anthropologique, dont les consĂ©quences se rĂ©vĂšleraient dans la pratique de lâaccompagnement, rappelant le prima de la relation sur toute action de soin. 66En tĂ©moignent les observations des professionnels et des proches, qui en ont ressenti les effets, mutuellement bĂ©nĂ©fiques, et parfois gĂ©nĂ©rateurs de reprĂ©sentations moins utilitaristes et plus apaisĂ©es de la Condition Humaine. Ainsi, Parler » aux personnes ĂągĂ©es dĂ©sorientĂ©es contribue-t-il peut-ĂȘtre Ă garder vivant, au sein de notre monde consumĂ©riste, le lien ancestral avec nos pairs ; leur prĂ©sence et leur parole animĂ©es tĂ©moignant de nos luttes, hĂ©roĂŻques et dĂ©risoires, lĂ oĂč la vie et la raison nous Ă©chappent et viennent interpeller notre appartenance Ă une lignĂ©e, Ă une histoire, Ă une destinĂ©e... 67Ou peut-ĂȘtre, ne sâagit-il plus simplement que de prĂȘter attention Ă nos vieux, de les respecter et dâen prendre soin grĂące Ă ce qui fonde notre HumanitĂ©, en nous employant Ă les aider Ă transmettre ce lien ancestral. 68Soigner câest aussi dĂ©visager, parler et reconnaĂźtre par le regard et la parole, la souverainetĂ© intacte de ceux qui ont tout perdu » [21]. Notes [1] Balmary Marie. Le Moine et la psychanalyste. Albin-Michel, Paris, 2005. [2] Erikson Erik. The life cycle completed. Extended version. New York, WW Norton & Co, 1997. [2] Cyrulnik Boris. Les nourritures affectives, Paris, Odile Jacob, 1993. [3] Freud Sigmund. Cinq leçons sur la psychanalyse, 4e ed. Payot, 1981. [4] Verwoert Adrian. Clinical geropsychiatry. Baltimore, Williams & co, 1976. [8] Piaget Jean. [9] Suzuki S., Esprit zen, esprit neuf, Le Seuil, Paris, 1977. [10] Watzlawick Paul Une logique de la communication, Le Seuil, Paris, 1979. [11] Cyrulnik Boris. Le murmure des fantĂŽmes, Odile Jacob, Paris, 2003. [12] Balmary Marie. Le Moine et la psychanalyste. Albin-Michel, Paris, 2005. [13] De Shazer S. Patterns of brief family therapy, Guilford, New York, 1987 [14] Congruence un message est dit congruent quand le verbal est en accord avec le non verbal. [15] Sauvy Jean. La maladie dâAlzheimer vĂ©cue Ă deux. ElĂ©gie. LâHarmattan, Paris, 2007. [16] NDLR. Ces constats sont instructifs mais nâont aucune valeur probante faute dâĂ©tudes versus population tĂ©moin et versus autre mĂ©thode. [17] Lâaccompagnement en Actions. VidĂ©o FNG Accompagner la Vie Ă Domicile. Maintenir la Relation ORRPA CLIC 51100. [18] Haley Jay. ThĂ©rapies orientĂ©es solution Problem solving therapy. Harper & Stratton, New York, 1976. [19] Feil Naomi, Validation, Lamarre, Rueil Malmaison, 2005. [20] Sauvy Jean, La maladie dâAlzheimer vĂ©cue Ă deux, LâHarmattan, Paris, 2007. [21] Bobin Christian, La prĂ©sence pure. Le temps quâil fait, Paris, 1999.
4e de couverture âJe dois rentrer pour nourrir mes enfants ! â Je lui dis alors â Madame Kessler, vous ne pouvez rentrer chez vous. Vos enfants ne sont pas lĂ . Vous ĂȘtes maintenant Ă la maison de retraite de Montefiore â. Elle rĂ©pond â Je le sais, ne soyez pas idiote. Câest pour ça que je dois partir tout de suite. Je dois rentrer chez moi pour faire manger mes enfants. â Aucune forme de rĂ©fĂ©rence Ă la rĂ©alitĂ© ne parvient Ă convaincre Madame Kessler. Elle se sent inutile dans une maison de retraite. Elle a besoin de retrouver son rĂŽle de maman de trois enfants et sa maison pour se sentir utile. Elle sâĂ©carte de moi en me pointant du doigt et marmonne â Quâest ce quâelle en sait et pour qui elle se prend, celle lĂ ! â. RĂ©orienter les vieillards dĂ©sorientĂ©s vers la rĂ©alitĂ©, entrer dans leur jeu, parler dâautre chose⊠quelle est la bonne attitude ? Dans ce livre Naomi Feil nous expose les principes fondateurs de sa mĂ©thode, la Validation Therapy, basĂ©e sur une attitude empathique, respectueuse et authentique envers le vieillard dĂ©sorientĂ©. Ce livre est destinĂ© Ă tous ceux qui prennent soin des â Vieux vieux â et les entourent quotidiennement. La mĂ©thode de Validation donne aux aidants des moyens pour ĂȘtre plus Ă lâaise dans lâaccompagnement de ces grands vieillards qui expriment leurs sentiments sans retenue. La Validation nous aide Ă comprendre ce qui se cache derriĂšre certains comportements, souvent trĂšs choquants. Lâauteur Naomi Feil est une psychosociologue amĂ©ricaine diplĂŽmĂ©e de lâuniversitĂ© de Colombia Ă New-York. Elle a Ă©laborĂ© entre 1963 et 1980 une mĂ©thode destinĂ©e Ă favoriser la communication avec les personnes ĂągĂ©es dĂ©sorientĂ©es. Et vous, quel est votre avis concernant cet ouvrage ? Pour vous procurer ce livre, cliquez sur lâimage ci-dessous
POURQUOI PARLER DE LA VALIDATION ? Le terme de Validation est Ă la mode, et les soignants qui ont des dĂ©ments en charge ont bien peu de chance dâĂ©chapper Ă cette notion. Il importe donc de savoir de quoi il sâagit. Mais la premiĂšre chose Ă faire est de se mĂ©fier quand on Ă©tudie la psychologie amĂ©ricaine on est frappĂ© de la frĂ©quence Ă laquelle on tombe sur la mĂȘme histoire une mĂ©thode Ă la fois simple et profonde qui rĂ©volutionne la prise en charge des malades. Quand on regarde dâun peu plus prĂšs on sâaperçoit que toutes ces mĂ©thodes ont toujours quelques points communs Elles prĂ©tendent fournir une explication de toute une partie de la psychologie voire de toute lâaventure humaine. En fait elles sont bĂąties sur des thĂ©ories Ă la soliditĂ© douteuse et qui relĂšvent davantage de la croyance, et se rĂ©duisent le plus souvent Ă une accumulation dâĂ©vidences. Elles ont Ă©tĂ© crĂ©es par des individus seuls, qui en gĂ©nĂ©ral nâont pas suivi des Ă©tudes classiques. Elles sâapproprient le plus souvent des pans entiers de travaux dĂ©jĂ connus. Elles demandent tout de mĂȘme une formation, gĂ©nĂ©ralement coĂ»teuse. Elles ne survivent guĂšre Ă leur inventeur [1]. Câest le schĂ©ma quâon retrouve notamment Ă la base de la bio-Ă©nergie, du cri primal, et sans doute bientĂŽt de lâhaptonomie mais beaucoup moins la sophrologie, par exemple câest un comportement qui a plus Ă voir avec celui des sectes quâavec la recherche scientifique. Les travaux de Naomi Feil sont de cette sorte. Mais malgrĂ© toutes les critiques quâon peut faire, il reste que les Ă©vidences dont elle parle sont bonnes Ă se rĂ©pĂ©ter, et que celui qui se contente de faire ce quâelle propose accomplit dĂ©jĂ des progrĂšs importants. Naomi Feil nâest pas une soignante mais une travailleuse sociale amĂ©ricaine ; elle dit avoir mis au point des techniques simples pour communiquer avec les malades atteints de dĂ©mence ; en fait on constate assez rapidement que ce sont des techniques qui nâont rien de spĂ©cifique, et qui peuvent ĂȘtre utilisĂ©es dâune maniĂšre ou dâune autre pour nâimporte quelle communication avec nâimporte qui. LâintĂ©rĂȘt de ces techniques est de pouvoir ĂȘtre utilisĂ©es par tous. Les intervenants aussi bien que les membres de la famille peuvent les mettre en pratique sans quâil leur en coĂ»te plus de quelques minutes par jour. LâIDĂE GĂNĂRALE DE LA VAILDATION LâidĂ©e qui sous-tend cette approche est assez simple il sâagit dâessayer de prendre le dĂ©ment en somme lĂ oĂč il est. Le plus souvent les intervenants conçoivent leur rĂŽle sur le mode de la rééducation, en cherchant Ă faire retrouver au dĂ©ment un comportement normal, ou de la prĂ©servation, en essayant de freiner le processus dĂ©mentiel. Ce travail est important, et il doit ĂȘtre fait. Mais on voit tout de suite lâĂ©norme inconvĂ©nient de cette approche elle revient Ă dire au dĂ©ment Redeviens ce que tu Ă©tais, tu nâes plus toi-mĂȘme » ; et en disant cela on laisse de cĂŽtĂ© le fait que le dĂ©ment est dâabord quelquâun, quâil est vivant, quâil sâexprime, et que ce quâil dit a une valeur. Le dĂ©ment sait parfaitement quâil est en train de perdre la tĂȘte [2]. Toute sa hantise est lĂ peut-il encore sâexprimer, se faire comprendre ? Ce quâil dit a-t-il encore un sens ? Chaque fois quâon essaie de corriger ce quâil dit on lâenfonce dans son dĂ©sarroi. Le propos de la validation est donc dâaccepter la maniĂšre dont le dĂ©ment sâexprime, en disant que ce quâil dit a un sens, une importance. Pour cela il faut rejoindre le dĂ©ment sur son terrain. Le dĂ©ment est dans son monde, il a du mal Ă comprendre ce qui lâentoure, cela lui fait peur, et câest la raison principale pour laquelle il se replie. Lâerreur commise par les soignants est souvent de vouloir ramener le dĂ©ment Ă la rĂ©alitĂ©, ce qui est trĂšs angoissant pour lui. On est plus efficace, plus aidant, en dĂ©cidant de le rejoindre lĂ oĂč il se trouve, en lui disant quâil a bien raison dâĂȘtre comme il est, en reconnaissant que ce quâil dit a un sens au lieu de lui renvoyer perpĂ©tuellement quâon ne le comprend pas, bref en validant son comportement et son propos au lieu dâessayer de le corriger. Mais le projet de prendre le dĂ©ment lĂ oĂč il est suppose quâon prenne deux prĂ©cautions essentielles. La premiĂšre est de rester parfaitement sincĂšre prendre le dĂ©ment lĂ oĂč il est ne veut pas dire quâon rentre dans son jeu. Si le dĂ©ment dĂ©lire on nâa pas le droit de dĂ©lirer avec lui valider câest reconnaĂźtre au malade le droit de penser ce quâil pense ; ce nâest en aucun cas faire mine de penser la mĂȘme chose. Nous en verrons des exemples chemin faisant. La seconde prĂ©caution Ă respecter pour prendre le malade lĂ oĂč il est est Ă©videmment de sâen donner les moyens, ce qui suppose quâon comprenne, prĂ©cisĂ©ment, oĂč il en est. LES THĂORIES DE LA RĂGRESSION La notion de rĂ©gression est une notion capitale en psychanalyse. La psychanalyse Lorsque je me trouve devant un problĂšme, je dispose de deux stratĂ©gies. La premiĂšre est de rĂ©soudre le problĂšme en inventant une solution ; cela sâappelle lâimagination, câest la stratĂ©gie la plus efficace, câest aussi la plus coĂ»teuse ; en psychanalyse cela sâappelle sublimation. La seconde est de chercher dans le passĂ© si je nâai pas dĂ©jĂ Ă©tĂ© confrontĂ© Ă une situation semblable ; jâessaie alors des solutions comme le serrurier essaie des clĂ©s lorsque je perds mes clĂ©s jâappelle un serrurier ; ce serrurier vient avec un lot de clĂ©s et cherche Ă ouvrir la porte en essayant diverses clĂ©s ; câest moins efficace car les situations ne sont jamais totalement identiques, mais câest moins coĂ»teux ; cela sâappelle lâexpĂ©rience ; en psychanalyse on appelle cela rĂ©gression car la solution que je vais appliquer est une solution que jâai trouvĂ©e dans un passĂ© parfois fort ancien. LâinconvĂ©nient de la rĂ©gression est double dâune part, comme on lâa dit, la solution que je trouve alors nâest pas parfaitement adaptĂ©e au problĂšme qui mâest posĂ© ; dâautre part lorsque jâapplique une solution issue du passĂ© jâai tendance Ă adopter aussi lâĂ©tat dâesprit qui Ă©tait le mien Ă cette Ă©poque-lĂ . Câest ainsi quâon peut comprendre, par exemple, une partie du comportement de lâalcoolique il se trouve incapable dâaffronter les problĂšmes de la vie, et il rĂ©gresse jusquâĂ ce quâil trouve une solution. Et la solution quâil trouve est de se comporter comme lorsquâil Ă©tait bĂ©bĂ©, et quâil suffisait dâun biberon pour apaiser son angoisse. Le problĂšme est quâil adopte alors un comportement de bĂ©bĂ© dans tous les domaines de sa vie, mĂȘme dans ceux qui ne sont pas directement liĂ©s Ă la boisson. Il va de soi que le dĂ©ment est particuliĂšrement exposĂ© au risque de rĂ©gression, puisque le problĂšme qui lui est posĂ© du fait de son effondrement intellectuel ne possĂšde aucune solution. Il ne peut donc espĂ©rer en inventer une, et ce dâautant moins que pour inventer une solution il faudrait prĂ©cisĂ©ment quâil ait un cerveau en bon Ă©tat. Il existe un certain nombre de thĂ©ories qui prĂ©tendent expliquer lâĂ©tat dâesprit du dĂ©ment. Toutes sont basĂ©es sur lâidĂ©e que le dĂ©ment, en somme, retombe en enfance, et que cette retombĂ©e a des chances de se produire comme une rĂ©gression, comme si le dĂ©ment parcourait Ă lâenvers le chemin de la vie ; Ă tout le moins cela demande preuve revenir en arriĂšre nâest pas le contraire de marcher en avant câest parcourir Ă lâenvers un chemin quâon a dĂ©jĂ parcouru une fois mais peu importe. Le plongeon rĂ©trograde Une thĂ©orie solide est celle du plongeon rĂ©trograde, de Daniel Taillefer, psychologue canadien, et qui sâappuie sur les travaux de Reisberg. Ce dernier a essayĂ© de classer la dĂ©tĂ©rioration intellectuelle en 7 stades selon la gravitĂ© de la perte. LâĂ©chelle de Reisberg sâĂ©tablit comme suit Stade 1 Aucune dĂ©tĂ©rioration. Stade 2 Manque du mot lĂ©ger plainte subjective concernant des troubles de mĂ©moire. Stade 3 DĂ©ficits de fonctionnement au travail, notamment dĂ©but de la dĂ©sorientation. Stade 4 Assistance requise aux tĂąches complexes. Stade 5 Assistance requise dans certaines dĂ©cisions de la vie quotidienne. Stade 6 Malade assistĂ© en permanence. Stade 7 Stade terminal. On voit tout de suite que ces stades sont tout de mĂȘme trĂšs approximatifs. Dâabord ils ne sont pas trĂšs bien adaptĂ©s Ă la rĂ©alitĂ© Rien ne prouve que le sujet de stade 2 est sur le chemin de la dĂ©mence. Le trouble du langage est loin de toujours prĂ©cĂ©der la dĂ©sorientation ou la perte des habiletĂ©s. Le manque de mot et le trouble de la mĂ©moire ne peuvent pas ĂȘtre reliĂ©s si facilement lâun nâest pas la cause de lâautre. Dâautre part dans la pratique ils ne sont pas si utiles que cela ; mais enfin ils permettent dây voir un peu plus clair, et de se parler commodĂ©ment entre soignants. Daniel Taillefer explique que chez le sujet atteint de dĂ©mence de type Alzheimer le cerveau parcourt Ă lâenvers le chemin de sa vie dans une sorte de rĂ©gression au sens psychanalytique du terme. Les stades de Reisberg seraient grossiĂšrement corrĂ©lĂ©s aux pĂ©riodes de lâexistence qui sont ainsi revĂ©cues dans le souvenir. La correspondance des Ăąges et de la mĂ©moire sâĂ©tablirait ainsi Stades 1 et 2 Pas de rĂ©gression. Stade 3 66 ans et plus. Stade 4 56 Ă 65 ans. Stade 5 48 Ă 55 ans. Stade 6 18 Ă 45 ans. Stade 7 0 Ă 15 ans. Donc un malade en stade 5, qui sait encore accomplir certaines tĂąches Ă©lĂ©mentaires de la vie quotidienne mais pas toutes pourra Ă©voquer facilement ses souvenirs de la quarantaine, et on le stimulera davantage en lui parlant de cette pĂ©riodes ; sur le plan du comportement il aura tendance Ă se conduire de la mĂȘme maniĂšre quâĂ cette Ă©poque-lĂ . Câest du moins ce que prĂ©voit la thĂ©orie. Que peut-on en pratique tirer de cette approche ? Probablement une chose trĂšs simple la dĂ©tĂ©rioration intellectuelle sâaccompagne dâune rĂ©gression. Il est fĂ©cond pour le soignant de repĂ©rer cette rĂ©gression, et par des moyens trĂšs simples de tenir compte, pour entrer en communication, du stade oĂč il se trouve. Si on sait que le dĂ©ment se trouve dans lâunivers de son adolescence, cela permet de sâorienter on peut choisir de sâinstaller avec lui dans cette couche de souvenirs, et les Ă©voquer systĂ©matiquement avec lui ; on peut au contraire essayer de lâen sortir pour parler dâautre chose les deux mĂ©thodes sont Ă©galement bonnes, mais il faut simplement savoir que les rĂ©sultats ne sont pas les mĂȘmes. On peut aussi comprendre que les souvenirs quâil Ă©voque entraĂźnent des Ă©motions et des comportements qui sont liĂ©s Ă cette Ă©poque ; on pourrait mĂȘme utiliser cette notion en adaptant son propre comportement si le patient se conduit comme un enfant face Ă sa mĂšre le soignant peut jouer Ă ĂȘtre une mĂšre aimante, autoritaire... Cela est simplement interdit car il sâagit alors de ce que les psychanalystes appellent utilisation du transfert et cela demande une formation trĂšs poussĂ©e. La thĂ©orie dâErikson Naomi Feil fonde toute son approche sur la thĂ©orie dâErik Erikson qui traite des stades de dĂ©veloppement de la vie et des tĂąches qui doivent ĂȘtre accomplies Ă chacun de ces stades. Cette thĂ©orie veut quâil y ait six pĂ©riodes de la vie, et quâĂ chacune ce ces pĂ©riodes corresponde une tĂąche Ă accomplir. Naturellement lâĂ©panouissement de la personne Ă un stade donnĂ© dĂ©pend beaucoup de la maniĂšre dont elle a rĂ©ussi les tĂąches quâelle devait accomplir aux stades prĂ©cĂ©dents, et Erikson en tire des conclusions qui font que sa mĂ©thode se rapproche beaucoup de la psychanalyse, dont elle est dâailleurs largement inspirĂ©e. Donc il y a six pĂ©riodes de la vie, et comme chez Taillefer le dĂ©ment a tendance Ă rĂ©gresser, parcourant lĂ aussi ces six pĂ©riodes dans une sorte de plongeon rĂ©trograde. La rĂ©partition dâErikson se fait comme suit 1. Prime enfance Le sujet doit apprendre Ă faire confiance quand il y a frustration. Sâil Ă©choue le sentiment est la dĂ©fiance je ne suis pas aimĂ©. 2. Enfance le sujet doit apprendre Ă se contrĂŽler, Ă suivre des rĂšgles. Sâil rĂ©ussit le sentiment est la joie dây parvenir. Sâil Ă©choue le sentiment est la honte, la culpabilitĂ©, le reproche Je souille tout. 3. Adolescence le sujet doit construire sa personnalitĂ©. Sâil rĂ©ussit il trouve sa propre identitĂ© ; il se dĂ©tache des parents. Sâil Ă©choue le sentiment est lâinsĂ©curitĂ© ; dĂ©lĂ©gation de rĂŽle je ne suis quelquâun que si je suis aimĂ©. 4. Ăge adulte le sujet doit Ă©tablir une relation dâintimitĂ© avec un autre ĂȘtre humain. Partage des premiers sentiments, sujet responsable de ses Ă©motions, de ses erreurs et de ses succĂšs. Sâil Ă©choue le sentiment est lâisolement, dĂ©pendance. 5. MaturitĂ© le sujet doit produire de nouvelles activitĂ©s quand les anciennes sont dĂ©passĂ©es ; se tourner vers quelque chose de nouveau. Sâil Ă©choue le sentiment est la stagnation. Fixation sur des rĂŽles dĂ©passĂ©s. 6. Vieillesse le sujet doit Boucler sa vie. Trouver la force intĂ©rieure, lâintĂ©gritĂ©. MĂ©langer le passĂ© au prĂ©sent, se donner de nouveaux buts. Sâil Ă©choue le sentiment est le dĂ©sespoir Je ferais mieux dâĂȘtre mort ». LâidĂ©e de Naomi Feil est quâen analysant le comportement du dĂ©ment on peut arriver Ă comprendre quel est le type de problĂšme quâil cherche Ă rĂ©soudre, et par lĂ Ă comprendre Ă quel niveau de rĂ©gression il est arrivĂ©. Par exemple cette vieille dame accumule des objets, au besoin les vole et les entasse dans sa chambre. Elle donne lâimpression quâelle le fait pour se prouver quâelle est quelquâun. LâidĂ©e est que quand elle Ă©tait une petite fille elle nâa jamais appris Ă faire confiance. Il est probable quâon retrouvera facilement chez elle des souvenirs, des comportements, des attitudes qui datent de cette Ă©poque-lĂ , et il faudra tenir compte de cette donnĂ©e pour amĂ©liorer la communication. Ailleurs câest un vieux malade qui sâattachant aux pas dâun intervenant ou dâun membre de sa famille ; on pense quâil cherche lâapprobation de cet intervenant qui reprĂ©sente pour lui lâautoritĂ© parentale on dirait un adolescent qui nâa jamais pu se dĂ©tacher de ses parents. On voit trĂšs vite les trois grandes critiques quâon peut faire Ă la thĂ©orie de Naomi Feil 1. Ce quâelle Ă©nonce nâest rien dâautre que la thĂ©orie de la rĂ©gression qui est Ă la base de la psychanalyse on peut dire la mĂȘme chose de la thĂ©orie du plongeon rĂ©trograde. 2. Elle a raison dâinsister sur la nĂ©cessitĂ© dâanalyser le comportement du malade. Mais il nâest pas difficile de voir que cette analyse est trĂšs imprĂ©cise, et que les interprĂ©tations donnĂ©es par les soignants seront toujours risquĂ©es et toujours discutables. 3. Elle en vient trĂšs vite Ă dire quâil est possible dâaider la personne dĂ©mente Ă rĂ©soudre les problĂšmes quâelle nâa pas su rĂ©gler jusque lĂ . On lâespĂšre, mais sans trop y croire câest une autre constante de ces thĂ©ories amĂ©ricaines que de prĂ©tendre rĂ©ussir des miracles. Bref, lâidĂ©e intĂ©ressante est que si nous parvenons Ă repĂ©rer Ă quel niveau le malade se situe nous allons pouvoir mieux le comprendre, et par lĂ Ă©tablir une relation plus apaisante pour lui. Nous allons donc procĂ©der en deux temps Dans un premier temps nous allons Ă©couter le patient et essayer de comprendre de quels souvenirs il nous parle. Dans un second temps nous allons essayer de comprendre quel est son comportement, et en quoi il rappelle une pĂ©riode de sa vie. Ensuite nous utiliserons les rĂ©sultats de cette enquĂȘte pour essayer de trouver le comportement qui permettra Ă la personne de se sentir comprise et apprĂ©ciĂ©e pour ce quâelle est. En somme pour trouver la clĂ© qui permet de calmer la personne, il suffit de lâĂ©couter vraiment, dâentendre ce qui cherche Ă se dire Ă travers son comportement, mĂȘme quand il est dĂ©rangeant ». Le projet de Naomi Feil est de suivre pas Ă pas, Ă travers des contacts quotidiens avec les personnes souffrant de dĂ©mence, le fil conducteur des ressentis dans le labyrinthe des Ă©motions. Dans la validation, ce quâon valide câest le comportement du malade on ne cherche plus Ă le rectifier, on le reconnaĂźt comme un comportement lĂ©gitime et qui dit quelque chose. LES OUTILS DE VALIDATION Naomi Feil dĂ©crit quatorze outils de validation. Ces outils ne sont pas tous originaux, on le soulignera Ă lâoccasion ; dâautres sont carrĂ©ment douteux... En fait ce sont le plus souvent des banalitĂ©s ; redisons que ces banalitĂ©s sont bonnes Ă entendre. Disons tout dâabord que le soignant intervient dans deux contextes Lors de relations spontanĂ©es en cours de journĂ©e. Lors dâinterventions programmĂ©es. Le soignant doit dâabord maĂźtriser lâintervention programmĂ©e, celle quâil a prĂ©vue et pour laquelle il a le temps. Quand il sera bien habituĂ© Ă ce type dâintervention il aura acquis la fluiditĂ© et lâaisance nĂ©cessaires pour amĂ©liorer ses relations spontanĂ©es. Les techniques de Naomi Feil sont prĂ©sentĂ©es ici dans un ordre logique, et ont Ă©tĂ© dĂ©barrassĂ©es de ce quâelles contiennent de trop discutable. Cette prĂ©sentation nâest donc pas... validĂ©e on ne prĂ©sente lĂ quâune opinion. Se concentrer Il ne sâagit absolument pas dâune technique de communication mais dâun prĂ©alable. Il est trĂšs important de se concentrer avant dâentrer dans une relation qui risque dâĂȘtre difficile ou Ă©prouvante. Câest le cas en accompagnement, quand on entre dans la chambre du mourant on fera du mauvais travail si on ne prend pas le temps de se dĂ©barrasser de ses propres problĂšmes. Il existe de multiples techniques de concentration, toutes plus ou moins inspirĂ©es du yoga. Il ne faut pas les valoriser outre mesure, ce nâest pas de la magie. Voici les recommandations de Naomi Feil pour lâutilisation de cette technique Regarder fixement un point situĂ© environ 5 cm en dessous de sa propre taille. Inspirer profondĂ©ment par le nez et emplir dâair ses poumons. Expirer par la bouche. Supprimer toute rĂ©flexion intĂ©rieure, pour consacrer toute son attention Ă sa seule respiration. Par huit fois, rĂ©pĂ©ter lentement cette procĂ©dure. Ceci permet de se mettre vraiment Ă lâĂ©coute de lâautre, en expulsant tous les sentiments de peine, de colĂšre et de frustration, afin de les mettre au placard pour un moment. La validation devrait toujours commencer par cette technique. Capter le regard du patient Le dĂ©ment reste trĂšs longtemps, sans doute jusquâau bout, sensible aux Ă©lĂ©ments de la communication non-verbale. Parmi ceux-ci le regard est important. Quand on entre en communication il faut Ă©viter tout ce qui ressemble Ă un rapport de force. Or en matiĂšre de comportement animal le signe de la domination est la place des yeux si mon interlocuteur est placĂ© de telle sorte que je le regarde de haut en bas, je le domine, et il se trouve en position dâinfĂ©rioritĂ©. Naturellement cette rĂšgle nâest pas absolue, et ne fait que nuancer le rapport de force lâenseignant est debout devant des Ă©lĂšves assis, de sorte quâil les regarde de haut en bas. Par contre le patron qui reçoit un employĂ© est assis, et lâemployĂ© est debout, de sorte que le patron le regarde de bas en haut ; pourtant le rapport de force est en faveur du patron, parce quâĂȘtre assis est un privilĂšge. Dans les deux cas, donc la position renforce lâautoritĂ© de celui qui la possĂšde. Il sâensuit que la seule maniĂšre dâĂ©viter lâaggravation du rapport de force est dâĂȘtre situĂ© Ă la mĂȘme hauteur que celui Ă qui on sâadresse. Cela signifie par exemple quâil nâest pas sain de converser avec le dĂ©ment en se mettant assis sur le bord du lit il faut faire lâeffort de se baisser jusquâĂ ce quâon ait les yeux exactement Ă sa hauteur. On sait que les regards sont capables dâexprimer un trĂšs grand nombre de sentiments. On sait moins comment câest possible le regard lui-mĂȘme nâest le fait que de lâĆil, et lâĆil ne se modifie que trĂšs peu seul le diamĂštre de la pupille peut changer, et cela dĂ©pend surtout de la luminositĂ©... Câest donc lâĆil qui porte le message et non le regard autrement dit ce sont les paupiĂšres et les mouvements des globes. Le regard est un enjeu fondamental de la communication avec le dĂ©ment, car câest lâinstrument qui permet de fixer son attention. Câest par le regard quâil conserve la notion dâune prĂ©sence humaine prĂšs de lui la parole est faite de mots quâil ne comprend plus trĂšs bien, ou plus du tout ; le toucher est trop peu spĂ©cifique. Il faut donc capter lâattention du dĂ©ment en se plaçant face Ă lui, et en le regardant dans les yeux ; Ă condition bien sĂ»r de veiller Ă ce que le regard ne soit en aucune façon agressant ou angoissant. Il est plus difficile de maintenir ce regard tout au long de lâentretien, il faut pourtant sây exercer. On ne doit pas craindre de pratiquer lâĂ©change des regards avec le dĂ©ment non communiquant on peut essayer dâexprimer des Ă©motions par le seul regard, et dâinterprĂ©ter les Ă©motions quâon reçoit en retour. On aura souvent la bonne surprise de constater que les yeux parviennent ainsi Ă se parler. Naturellement de telles expĂ©riences ont quelque chose de douteux en communication non-verbale rien nâest plus facile que de prendre ses dĂ©sirs pour des rĂ©alitĂ©s. Mais on peut au moins prĂ©sumer que mĂȘme si on se trompe quelque peu en interprĂ©tant les rĂ©actions du dĂ©ment ce dernier aura tirĂ© quelque avantage du fait quâon lui aura consacrĂ© ce temps. Penser autrement reviendrait Ă dĂ©nier au fond toute valeur Ă notre action envers le dĂ©ment. Parler dâune voix claire, basse et affectueuse Dans une conversation, il y a les mots qui sont prononcĂ©s, avec leur signification, ce qui forme le contenu du message. Mais il y a aussi, nous le savons bien, la maniĂšre dont les mots sont prononcĂ©s le travail sur lâintonation est la base du mĂ©tier dâacteur. Allons plus loin la tonalitĂ© de mon message contient des informations, et ces informations sont souvent au moins aussi importantes que le contenu objectif des mots on a tort dâopposer comme on le fait le fond et la forme ces deux notions sont totalement interdĂ©pendantes. Cela est dâautant plus vrai chez le dĂ©ment Il est en difficultĂ© pour comprendre le fond du message, car il ne connaĂźt plus le sens des mots. Comme il ne comprend plus le sens des mots, il est encore plus sensible Ă leur environnement affectif. Il est en souffrance, et de ce fait hypersensible Ă tout ce qui constitue lâambiance affective de la relation. Il importe donc dâadopter un ton de voix rassurant ; cela suppose de parler lentement, doucement, sans Ă©lever la voix. Il faut sây exercer. Il faut savoir, avant dâentamer la conversation, prendre le temps de se recentrer sur soi-mĂȘme et de se prĂ©parer. Mais cette rĂšgle est rapidement limitĂ©e 1. Les modalitĂ©s concrĂštes du travail ne laissent pas toujours le temps de se mettre en condition. 2. Le dĂ©ment est souvent sourd, ce qui impose de lui parler fort. 3. Ce quâon veut dire au malade nâest pas forcĂ©ment compatible avec une douceur du ton. Certes on peut toujours sâefforcer de rester calme, mais il ne faut pas quâil y ait une trop grande contradiction entre ce quâon veut dire et la maniĂšre dont on va le dire, faute de quoi le dĂ©ment va sây perdre il y a en somme des maniĂšres angoissantes dâĂ©liminer lâangoisse. 4. Mais dâun autre cĂŽtĂ© parler de maniĂšre douce et chaleureuse ne veut pas dire adopter un ton lĂ©nifiant ou infantilisant. Le ton juste serait plus prĂšs de celui du psychiatre que de celui de la nourrice. 5. Il nâest pas si simple de trouver le ton juste le pire serait dâadopter un ton si neutre quâil nâexprimerait aucun sentiment, ce qui serait particuliĂšrement angoissant. Il faut donc prendre garde Ă ne pas Ă©liminer du ton de la voix toute trace de sentiment il sâagit dâavoir un ton bienveillant, non un ton neutre ou indiffĂ©rent. Notons dâautre part que le fait dâadopter un ton de voix rassurant va organiser la rĂ©gression dans deux directions Le patient va entendre un soignant qui lui parle comme aurait fait sa mĂšre. Cela ne manquera pas de dĂ©clencher chez lui des attitudes semblables Ă celle quâil aurait eue avec sa propre mĂšre, et de le renvoyer dans le monde de son enfance, avec les souvenirs de son enfance. Le soignant qui adopte un ton de voix maternel va se retrouver dans la position quâil adopterait vis-Ă -vis de son enfant, ce qui nâest pas sans danger accessoirement il pourra Ă©galement retrouver des comportements qui tĂ©moignent de ce quâil a vĂ©cu avec sa propre mĂšre.... Identifier et utiliser le sens prĂ©fĂ©rĂ© Il sâagit de ce quâon appelle les canaux de communication. Si on veut vraiment parler la langue dâune autre personne et entrer dans son monde afin de gagner sa confiance, la meilleure façon de faire est dâapprendre Ă percevoir le monde comme elle le perçoit. Pour ce faire, il faut se mettre Ă lâĂ©coute et observer attentivement. Les paroles et les actions finiront par dĂ©voiler lequel de ses cinq sens la vue, lâouĂŻe, le goĂ»t, lâodorat et le toucher la personne utilise le plus dans ses expĂ©riences de la vie au quotidien. Le langage tĂ©moigne facilement du canal de communication prĂ©fĂ©rĂ© de la personne. Il suffit de faire attention aux mots quâelle utilise ils traduisent sa maniĂšre de percevoir le monde. LâexpĂ©rience la plus simple est de faire raconter une scĂšne donnĂ©e, par exemple un mariage. On verra vite que les divers participants sont capables de raconter correctement le mĂȘme mariage mais que chacun insistera dâabord sur des points particuliers La robe de la mariĂ©e Vision Le repas GoĂ»t Lâorchestre Audition Le parfum des tilleuls Odorat Le velours des siĂšges Toucher Mais les choses vont beaucoup plus loin, et sont beaucoup plus subtiles, car la question des canaux de communication imprĂšgne et structure tout le langage. Par exemple pour dire son aversion pour quelquâun, on peut employer des canaux diffĂ©rents Je ne mâentends pas avec lui Audition Je ne peux pas le voir Vision Je ne peux pas le sentir Odorat Il me hĂ©risse ; Toucher Il me dĂ©goĂ»te GoĂ»t Une fois le sens privilĂ©giĂ© connu, lâintervenant qui se sert de la Validation se servira des mots clĂ©s qui correspondent Ă ce sens en sâadressant Ă la personne atteinte. Pour une personne qui utilise plus la vue pour comprendre son environnement, on pourra dire Jâai bien vu ça, moi aussi » ; pour une autre qui utilise plutĂŽt lâouĂŻe, on dira Je vous entends clairement » ; et pour une personne dont le sens du toucher est prĂ©dominant Câest doux, nâest-ce pas ? » et ainsi de suite. Toucher Cette technique sâapplique bien avec les personnes qui Ă©prouvent de la difficultĂ© Ă voir et Ă entendre, dont la perception du temps est affectĂ©e, et qui sont incapables de reconnaĂźtre les gens, peu importe quâils soient des proches ou des Ă©trangers. Le contact tactile devient donc un mode important par lequel on peut communiquer son affection ou du respect Ă ces personnes, ce qui a souvent comme rĂ©sultat de crĂ©er des liens serrĂ©s entre ces personnes et les intervenants utilisant cette approche. Lorsque la personne est encore plus refermĂ©e sur elle-mĂȘme et quâelle ne semble plus se prĂ©occuper de ce qui lâentoure, le toucher permet dâentrer dans son monde ; ainsi des souvenirs agrĂ©ables de la tendre enfance sont ravivĂ©s Ă travers le toucher. Tout en respectant lâintimitĂ© de la personne, on peut, par exemple, faire des mouvements circulaires du bout des doigts sur le haut de la joue ou derriĂšre la tĂȘte. Ou alors, en se servant des deux mains, une sur chaque cĂŽtĂ© du visage, on peut toucher le lobe de lâoreille avec lâauriculaire, et descendre ensuite le revers des mains le long de la mĂąchoire jusquâau menton pour ensuite descendre le long du cou. On peut Ă©galement masser les Ă©paules, le haut du dos, ou toucher le bas du mollet avec le bout des doigts. Il est cependant important de toujours approcher la personne de face car on peut la surprendre en arrivant de cĂŽtĂ© ou par en arriĂšre. Il est tout aussi important de respecter lâĂ©tat dâesprit de la personne en lâapprochant, et dâĂȘtre sensible Ă tout signe de rĂ©sistance car ce ne sont pas toutes les personnes qui aiment ĂȘtre touchĂ©es. Le choix des mots pour crĂ©er la confiance Il faut comprendre ce qui va mettre le dĂ©ment en difficultĂ©. En gros il lui est assez facile de parler de ce quâil voit, nettement moins de ce quâil pense ; il sait dĂ©crire, mais pas analyser. Il faut donc utiliser des mots simples, qui nâouvrent pas la porte Ă des Ă©motions trop difficiles Ă affronter. Par exemple les questions Qui ? Quoi ? OĂč ? Quand ? Comment ? sont assez facilement traitĂ©es par le malade, alors que la question Pourquoi ? la met tout de suite en difficultĂ© le malade se sent acculĂ© au pied du mur lorsquâon lui demande pourquoi il a fait ce quâil a fait, ou pourquoi un Ă©vĂ©nement est arrivĂ©. On lui demande alors de motiver ses gestes ou ses paroles, câest-Ă -dire de rĂ©flĂ©chir sur lui-mĂȘme, ce qui lui est trĂšs difficile ; et sâil le fait il risque de se retrouver sur le chemin de sentiments souvent porteurs dâune grande charge Ă©motive, ce qui va lui faire peur. Naomi Feil donne lâexemple suivant une dame de 80 ans prĂ©tend que quelquâun lui dĂ©robe ses bijoux. PlutĂŽt que de discuter avec elle, sa fille concentre la discussion sur des faits prĂ©cis. Qui accuses-tu de te dĂ©rober tes bijoux, Maman ? », demande-t-elle. La mĂšre est intĂ©ressĂ©e par la question et lui rĂ©pond Câest la femme de mĂ©nage. » Que dis-tu donc quâelle tâa volĂ© ? » demande la fille, en continuant Ă focaliser sur des faits. La derniĂšre chose quâelle mâa volĂ©e, ce sont mes boucles dâoreilles noires celles que Papa mâa donnĂ©es. » Ce sont tes prĂ©fĂ©rĂ©es », rĂ©pond la fille. Papa te donnait toujours de jolies choses. Il savait bien ce qui tâallait le mieux. Quand te les avait-il donnĂ©es ? » Juste aprĂšs notre mariage, pendant notre lune de miel », rĂ©pond la mĂšre. Ici on commence Ă voir ce quâest le mĂ©canisme de validation lâintervenante nâa pas cherchĂ© Ă dĂ©tromper la malade, elle nâa pas cherchĂ© Ă la rassurer ; rassurer la patiente revenait Ă lui dire quâelle avait tort ; or ce qui importe le plus au dĂ©ment câest dâavoir raison. Pour y parvenir lâintervenante a acceptĂ© de ne pas se demander si la colĂšre de sa mĂšre Ă©tait justifiĂ©e elle lui a simplement reconnu le droit dâĂȘtre en colĂšre. Et dĂšs quâelle a vu sa colĂšre validĂ©e, la mĂšre nâen a plus eu besoin, elle a pu cesser dâaccuser la femme de mĂ©nage et il est devenu facile de la faire dĂ©river jusquâau point oĂč elle pouvait se mettre Ă Ă©voquer le souvenir de son mari. Reformuler La personne atteinte se sent comprise si ses mots sont repris par quelquâun dâautre. Cela la rassure. On peut dire la phrase en utilisant les mĂȘmes mots-clĂ©s et en rĂ©pĂ©tant lâessentiel. Imiter le ton de la voix et le dĂ©bit est aussi un excellent moyen de montrer Ă la personne atteinte quâon la comprend et quâon est sensible Ă sa rĂ©alitĂ©. La reformulation est une mĂ©thode Ă part entiĂšre, et une sĂ©ance y sera probablement consacrĂ©e. Naomi Feil donne lâexemple dâun vieil homme qui accuse son garagiste de lui abĂźmer sa voiture ». Cette accusation est totalement fausse, et le garagiste devrait se dĂ©fendre. Mais ce dernier se rend compte que quelque chose ne va pas en fait il a lâintuition que le vieil homme sâidentifie sa voiture ; Ainsi, lorsquâil dit au garagiste quâil ne comprend pas pourquoi sa voiture a besoin de rĂ©parations elle allait pourtant bien la semaine derniĂšre... », il est en rĂ©alitĂ© en train de lui dire sa frustration face au fait quâil ne se sent pas aussi bien quâavant. Sa voiture sert de prĂ©texte Ă masquer ces pertes qui lâaffectent profondĂ©ment. Au fond de lui, le vieil homme sait que sa vue baisse et quâil perd peu Ă peu son sens de lâorientation. Il se sent usĂ©, tout comme la boĂźte de vitesses de sa voiture. Le garagiste sent ce que le vieil homme lui dit vraiment et du coup il nâargumente pas. Il va utiliser une autre technique qui est celle de la reformulation il va simplement rĂ©pĂ©ter les mots du vieil homme, ce qui lui montre quâil lâa entendu, quâil lâa compris, que ses mots peuvent ĂȘtre dits par dâautres ; et cela va encourager le vieil homme Ă aller plus loin, jusquâĂ dire le fond de sa pensĂ©e ce que le malade dit a un sens, cela peut ĂȘtre Ă©changĂ©. Vous mâavez abĂźmĂ© ma voiture. Vous pensez que je vous ai abĂźmĂ© votre voiture ? reformulation Ă©cho Bien sĂ»r ! la semaine derniĂšre elle marchait encore trĂšs bien ! Jâai lâimpression que vous ĂȘtes trĂšs troublĂ© par cela reformulation du non-verbal. Oui, ce nâest pas normal, ce nâest pas parce quâelle est vieille quâelle doit tomber en panne. Ce nâest pas une explication... reformulation ouverture. Non, bien sĂ»r ! Tenez moi jâai quatre-vingts ans, eh bien je suis en pleine forme. Vous vous sentez trĂšs bien. Remarquez, on ne sait jamais... Etc... Utiliser la polarisation Cette technique consiste Ă laisser la personne atteinte exprimer sa frustration sur un objet ou une situation alors que nous savons que ce nâest pas la cause du problĂšme. Par exemple, lorsque la dame se plaint des plats servis Ă table, on lui demande Vous trouvez que câest le plus mauvais jambon que vous ayez jamais mangĂ©, nâest-ce pas ? » Nous savons bien quâau fond, elle en a contre ses dents qui ne lui permettent plus de mastiquer comme avant. Mais en la laissant sâexprimer et sâemporter contre la nourriture, son anxiĂ©tĂ© a diminuĂ© et elle en a ressenti un certain soulagement. Il faut bien comprendre pourquoi cette technique est efficace. Et il y a trois grands mĂ©canismes 1. Dâabord il y a le mĂ©canisme gĂ©nĂ©ral de la validation on a reconnu Ă la dame le droit dâĂȘtre en colĂšre, et câest ce qui importait. Câest la condition pour quâelle puisse Ă©ventuellement dĂ©river vers la vraie cause comme dans lâexemple du bijou volĂ©. 2. Ensuite il y a la validation du subterfuge la grand-mĂšre a sans doute besoin de se dire quâelle est encore capable de sauver les apparences et de duper son monde. 3. Enfin il y a le mĂ©canisme de toute colĂšre la colĂšre est une Ă©motion, qui demande Ă ĂȘtre dĂ©versĂ©e. Une fois cela accompli, la patiente se dĂ©tend. Ăvidemment il est plus facile de tolĂ©rer une injustice contre un jambon que contre un soignant, mais câest une autre question. Imaginer le contraire et faire se souvenir Parfois, il faut essayer dâimaginer le contraire de la situation vĂ©cue » par la personne, ce qui lui permet de retrouver une solution faire se souvenir quâelle a autrefois utilisĂ©e pour rĂ©gler la situation. Ces techniques peuvent redonner confiance en elle-mĂȘme Ă la personne atteinte et en celui ou celle qui lâaccompagne. Par exemple, une malade dit Un homme vient dans ma chambre la nuit. » Utiliser la technique du contraire » câest essayer de lâamener Ă se rappeler les occasions oĂč lâhomme nâest pas venu. Le voyez-vous toutes les nuits ? » La dame, surprise, constate que lâautre soir, quand nous sommes venu la visiter et quâelle a veillĂ© tard, il nâĂ©tait pas lĂ . Pourtant, dĂšs quâelle a Ă©tĂ© seule il Ă©tait revenu. Alors câest seulement quand vous ĂȘtes seule que vous le voyez ? Si nous Ă©tions avec vous tout le temps, cela ne vous importunerait plus ? » La dame acquiesce et raconte quâelle nâa jamais Ă©tĂ© seule de sa vie et combien elle sâest sentie abandonnĂ©e Ă la mort de son mari, qui avait toujours Ă©tĂ© Ă ses cĂŽtĂ©s. Doucement, on demande Ă la dame ce quâelle a fait Ă ce moment-lĂ pour se sentir moins seule faire se souvenir. Elle rĂ©pond quâelle passait ses nuits entiĂšres Ă regarder les vieilles photos de son mari en Ă©coutant la musique quâil aimait. On voit facilement comment cette technique fonctionne le fait dâimaginer le contraire permet Ă la personne ĂągĂ©e de prendre de la distance vis-Ă -vis de la situation angoissante. En Ă©voquant une situation oĂč lâhomme nâest pas lĂ on permet Ă la dame de constater quâil nâest pas toujours lĂ et que donc il nâenvahit pas tout lâespace il y a de la place pour penser Ă autre chose. La technique du souvenir est beaucoup plus banale ; encore faut-il bien comprendre ce quâon fait quand on lâutilise. Au moment du grand Ăąge, il nâest plus possible dâapprendre des façons nouvelles de se dĂ©brouiller ». Lâavenir, mais aussi le prĂ©sent sont des mondes angoissants. Par contre parler du passĂ© est un excellent moyen dâinstaurer un climat de confiance. Cela aide Ă©galement Ă sâadapter Ă une situation de crise, Ă un stress ou Ă une vive Ă©motion. Cela nâest pas simple il nâest pas si facile de parler du passĂ© Ă quelquâun Ă qui la mĂ©moire commence Ă faire dĂ©faut. Mais enfin dans la mesure oĂč le patient se souvient, et surtout dans la mesure oĂč on ne le confronte pas Ă ses Ă©checs, on peut arriver Ă le sĂ©curiser. Naturellement ces deux techniques sont employĂ©es lâune Ă la suite de lâautre. Utiliser lâambiguĂŻtĂ© Lorsque la personne atteinte utilise des mots incomprĂ©hensibles, lâintervenant qui connaĂźt la Validation peut prendre part Ă la conversation sans la contredire. Ainsi, lâintervenant se sert du mot inconnu, mais en le remplaçant par il », elle », on » ou par câĂ©tait ». Par exemple, Ă une personne qui se plaint en disant Ces catawalks me font mal ! », lâintervenant peut rĂ©pondre OĂč vous font-ils mal ? », le pronom ils » remplaçant le mot inconnu catawalks ». Ă une autre personne qui dit Jâai chuftĂ© avec les mounnets », on pourra rĂ©pondre Et câĂ©tait agrĂ©able ? Que vous a-t-on dit ? » Les mots ils », elles », on », câĂ©tait » etc. sont utilisĂ©s pour remplacer les mots inconnus du dictionnaire. De cette façon, la communication est maintenue et la personne atteinte se sent comprise. Elle a lâimpression dâĂȘtre une interlocutrice valable dans la discussion. Mais cette technique nâest utilisable quâĂ condition de lâavoir bien comprise il ne sâagit en aucun cas de se moquer de la personne. Il sâagit au contraire dâune Ă©coute particuliĂšrement subtile essayer de comprendre de quoi on nous parle alors que les mots sont perdus ; essayer plus encore de sentir quelles sont les Ă©motions de lâautre alors mĂȘme que nous ne savons pas ce qui lâĂ©meut. Il sâagit en somme du vĂ©ritable accompagnement accompagner lâautre câest accepter dâaller avec lui alors quâon ne sait pas oĂč il va. Observer, puis copier les mouvements et les Ă©motions de lâintĂ©ressĂ© Naomi Feil appelle cela la technique du miroir ». Cette technique permet Ă lâintervenant dâentrer dans le monde Ă©motionnel de la personne. Elle sert Ă tisser un lien de confiance avec une personne atteinte qui ne sâexprime plus verbalement, afin dâĂ©viter quâelle se replie totalement sur elle-mĂȘme. Pour ce faire, lâintervenant observe soigneusement lâattitude, les yeux, les expressions du visage, la lĂšvre infĂ©rieure, lâallure gĂ©nĂ©rale, les mouvements rĂ©pĂ©titifs, etc. de la personne atteinte. Lâintervenant cherche ensuite Ă accorder son attitude, ses gestes et sa respiration Ă ceux de la personne Ă valider. La technique du Miroir » effectuĂ©e avec empathie devient un outil prĂ©cieux pour crĂ©er ce climat de confiance indispensable au mieux-ĂȘtre de la personne atteinte. Voici le tĂ©moignage que livre Naomi Feil sur lâutilisation de cette technique Mildred Hopkins, ancienne secrĂ©taire dâavocat, ne sâest jamais mariĂ©e. Elle a travaillĂ© pour le mĂȘme cabinet pendant 45 ans. Aujourdâhui, Ă 86 ans, [...], elle a besoin nĂ©anmoins de rester active. Le travail a toujours Ă©tĂ© son unique source de dignitĂ©. Se voyant en esprit devant sa machine Ă Ă©crire Underwood, elle retrouve les gestes du passĂ© et remue rapidement les doigts pour achever de taper ce que son patron lui a dictĂ©, avant quâil ne se rende au tribunal. Lâintervenante qui utilise la Validation imite les mouvements de doigts de Mildred. Cette derniĂšre voit les doigts de son imitatrice reproduire le rythme des siens. Elle lĂšve les yeux. Leurs regards se croisent. Elles tapent ensemble. Avec admiration, lâintervenante sourit Ă Mildred Combien de mots-minute pouvez-vous taper ? », lui demande-t-elle. 92 ! » rĂ©pond Mildred avec fiertĂ©. Câest le premier mot quâelle prononçait depuis son entrĂ©e Ă la maison de santĂ©, 6 mois plus tĂŽt ». En copiant ses mouvements, lâintervenante qui sâest servi de la Validation a créé une complicitĂ© avec elle. RassurĂ©e sur le plan relationnel, Mildred commença Ă sâextĂ©rioriser. Son Ă©locution revint peu Ă peu et elle sembla retrouver de lâintĂ©rĂȘt pour ce qui se passait autour dâelle. Associer le comportement avec les besoins insatisfaits ou les besoins exprimĂ©s Il sâagit ici de reconnaĂźtre que le comportement de la personne atteinte exprime, dâune façon ou dâune autre, lâun des trois besoins fondamentaux de lâĂȘtre humain ĂȘtre aimĂ©, ĂȘtre utile et le besoin dâexprimer les fortes Ă©motions. Tout le problĂšme est donc de savoir quels sont les besoins exprimĂ©s par tel ou tel comportement ; on peut y parvenir en observant le malade, et lĂ encore en Ă©coutant le sentiment qui sâexprime pendant le comportement. ConsidĂ©rons par exemple un patient qui passe ses journĂ©es Ă frotter les meubles a une raison de le faire. Le soignant peut rĂ©agir de trois maniĂšres 1. Il peut essayer dâempĂȘcher le malade de frotter au motif que câest sale. 2. Il peut laisser le malade Ă son comportement sans chercher Ă lâinterprĂ©ter. 3. Il peut enfin essayer de percevoir lâĂ©motion ou le besoin associĂ© au comportement. Dans ces dernier cas, sâil parvient Ă comprendre ce qui se passe, il va pouvoir aider le patient en lui parlant de ce qui se passe. Utiliser la musique La musique fait appel aux Ă©motions. Et les Ă©motions sont ancrĂ©es bien loin dans la mĂ©moire affective de la personne. Ce qui fait que souvent, les gens qui ne parlent plus sont quand mĂȘme capables de chanter une chanson de leur enfance. AprĂšs avoir entendu puis chantĂ© une mĂ©lodie familiĂšre, des personnes atteintes qui ne parlaient plus du tout sont parfois capables de dire quelques mots ; en toute hypothĂšse elles sont le plus souvent trĂšs attirĂ©es par la musique, le rythme, et cela les calme le plus souvent trĂšs bien. EN GUISE DE CONCLUSION Il est facile de voir que la Validation nâest pas une mĂ©thode, mais une succession de techniques, certaines Ă©videntes dâautres moins, certaines originales dâautres moins, et que tout cela ne va pas trĂšs loin. Mais il reste une idĂ©e fondamentale, qui doit ĂȘtre connue et mise en pratique il importe de reconnaĂźtre au dĂ©ment le droit Ă la parole, et surtout le droit Ă sa parole. Ce quâil nous dit nâest pas conforme aux rĂšgles habituelles de la logique et de la communication ; cela ne signifie en rien quâil nâa pas quelque chose Ă nous dire. Lorsquâun patient est empĂȘchĂ© de parler, par une aphasie ou une trachĂ©otomie, nous savons dire que notre devoir est dâessayer par-dessus tout de le comprendre ce nâest pas parce quâil nâa plus accĂšs au langage quâil nâa rien Ă dire. De la mĂȘme maniĂšre le dĂ©ment nâa plus accĂšs Ă la parole ; pour autant ce serait une erreur que de croire quâil ne pense pas. La mission du soignant est alors de comprendre le dĂ©ment autant quâil est possible ; pour cela la premiĂšre chose Ă faire est de lui faire confiance il faut avoir confiance dans son aptitude Ă penser, Ă communiquer, mĂȘme si câest un peu difficile. Lâobjectif de la Validation nâest rien dâautre.
les 14 techniques de validation naomi feil